Source : Project Gutenberg ebook du NY Times Histoire actuelle, Vol 1 Numéro 6.
«C’était le général de Castelnau, que beaucoup considéraient comme le meilleur général français, mais royaliste et catholique, et donc suspect ». Cette citation, issue des Mémoires du Major Harbord (du corps expéditionnaire américain), nous montre les différents attributs de ce général, tout autant qu’une contestation visible à cette époque.
L’histoire de la famille
Édouard de Currières de Castelnau est issu de l’une des plus anciennes familles de France. Cette famille est profondément ancrée dans le Rouergue et plus précisément dans l’Aveyron depuis l’an 1205. En 1773, le juge d’armes de France déclare : « Cette maison ou famille, qui est du Rouergue, est connue et prouve sa filiation depuis 1264 mais rien n’est plus simple que le caractère de la noblesse ». Par ces propos, il montre le côté ancien et reconnu de cette famille en France mais aussi le côté noble que cette famille n’a cessé de développer à travers les siècles.
Cette famille garde la même culture et la diffuse à ses membres à travers les siècles avec un esprit de famille qui reste omniprésent. De plus, on peut aussi apercevoir des valeurs communes tels que le sens du service, l’esprit de famille, la fidélité à la France ou encore à son souverain.
La formation
Tout d’abord, Edouard de Currières de Castelnau fut un officier remarqué. Il est de la promotion de Saint-Cyr avant d’être envoyé au front dès la fin de sa première année d’étude. Nommé sous-lieutenant malgré son jeune âge, il est confronté à la guerre dès ses 19 ans.
Castelnau a une activité forte durant la guerre. En effet, il participe notamment aux combats de Chambord, Marnage, Poirier, au Mans, à Chasille. Cette omniprésence militaire lui fait grimper les échelons dans l’armée au sein de laquelle il ne reste pas longtemps sous-lieutenant. Jusqu’en 1914, il se consacre à l’état-major et ses qualités sont appréciées par ses supérieurs, comme le général de Boisdeffre qui, en 1898, le qualifie « d’officier supérieur » et même l’un des « officier[s] les mieux doués que j’ai rencontrés ».
Un chef militaire/ Une figure militaire
La Première Guerre mondiale va être un tournant dans la carrière militaire de Castelnau. Premièrement, durant cette guerre, cet homme est respecté pour sa valeur et sa capacité à prendre des décisions importantes concernant la France et sa victoire future. C’est le seul général à commander l’une des cinq armées françaises d’août 1914 et à occuper encore un poste de haut commandement en novembre 1918.
On va s’intéresser à quelques moments clés concernant ce général durant la Première Guerre mondiale. Par exemple, l’un des moments fondateurs est la victoire du Grand Couronné de Nancy. Le terme de « Grand Couronné » désigne une série de hauteur dominant la plaine à l’est de Nancy. Le général de Castelnau va jouer un rôle majeur car c’est lui qui va préparer la défense de cet espace. Les Allemands décident d’attaquer de front les défenses françaises. Cependant, le général, connaissant le terrain en raison de la guerre franco-prusienne, va, par sa stratégie, remporter une importante bataille pour la France. Cette victoire deviendra symbolique par la suite. Ainsi, Joffre va féliciter Castelnau en louant ses qualités : « Depuis près d’un mois, l’armée que vous commandez a combattu presque tous les jours et a montré des qualités remarquables d’endurance, de ténacité et de bravoure ».
Source : Guide Michelin, 1919.
Une religion omniprésente dans le domaine privé…
Son père est monarchiste et profondément tourné vers la religion. Il est très catholique et pieux. Sa mère est dévouée à sa famille, à son mari et à Dieu. Le général Castelnau a suivi une scolarité marquée par l’enseignement des Jésuites et l’apprentissage de la religion catholique. De plus, même dans le journal du commandant Jacquand, on peut voir que les hommes proches du général sont des catholiques engagés : « Mais le secrétaire du général de Castelnau, c’est un Jésuite ». Il va transmettre cette religion à tous ses enfants. Il livre à tous ses enfants les sentiments qui sont les siens, c’est-à-dire une religion omniprésente dans leurs vies et un statut militaire. En effet, six ont été officiers et ont servi au côté de leur père. Trois sont morts à la guerre. On peut retrouver une représentation de la mort de l’un de ses fils, accompagnée de la réaction de son père, sur un vitrail de la chapelle du cimetière militaire de Riche : « Va mon fils, tu as la plus belle mort qu’on puisse souhaiter ».
… et dans le domaine public
Il joue un rôle religieux au-delà de sa famille. En effet, Castelnau devient un symbole représentant l’Eglise et la religion catholique. Il incarne le porte-drapeau des catholiques français. Tout part des lois de la République en matière de religion, c’est-à-dire une relance de la politique anticléricale dans certaines régions de la France comme en Alsace-Lorraine. Des catholiques protestent et se révoltent mais manquent de chefs. En 1924 à Rodez et devant 3 000 catholiques tous acquis à sa cause, Castelnau prononce un discours fédérateur : « il faut un groupement puissant par sa cohésion, sa discipline et son unité ». Castelnau, libéré de son rôle politique de député, choisit de se consacrer à temps plein à la FNC (France Nationale Catholique). En 1926, deux ans après sa création, la FNC réunit environ un million huit cent mille adhérents avec, à sa tête, le général Castelnau.
Source : collection Alain Lamour.
Un homme politique
Castelnau voit, en cette occasion, une possibilité de rentrer en politique. C’est presque selon lui « une seconde carrière ». Le général se lance dans une campagne électorale pour se faire élire député en Aveyron. Grâce à son prestige et son aura en France et plus particulièrement en Aveyron, il arrive à avoir facilement et rapidement un électorat conquis à sa cause. De plus, c’est l’Eglise qui finance principalement sa campagne. Le 16 novembre 1919, Castelnau est élu dans la deuxième circonscription de l’Aveyron sur les listes du Bloc national. Ce dernier fait partie du groupe de l’Entente républicaine démocratique qui est un siège à droite avec les catholiques de l’Action libérale. De plus, Castelnau est élu président de la Commission de l’Armée.
Un homme constesté
Castelnau sort de la Première Guerre mondiale comme un vainqueur proclamé et admiré par la population française. Il est même reconnu par tous les belligérants de la guerre. De ce fait, la population française ne comprend pas que le titre de maréchal ne lui soit pas encore attribué et un débat se crée au sein de la société française.
Source : Archives de la Vendée.
Le Gaulois choisit même de titrer l’une de ses unes : « Quand allez-vous le nommer maréchal ? ». Des scènes apparaissent dans lesquelles on peut voir notamment le général à Colmar sous une foule qui crie unanimement : « maréchal ». Clemenceau, homme d’état français, ne « l’aimait pas » et le qualifiait de « capucin botté ». Il était même considéré comme un « bon soldat du Second Empire ». De plus, ce général prône des idées de monarchie qui seront un moyen pour ses opposants de le discréditer de manière à ne pas obtenir ce fameux titre de maréchal. Les républicains ont peur de ce général qui attire les foules, possède le respect de l’armée et qui pourrait renverser le pouvoir par un coup d’état.
Pour conclure, Castelnau est une figure militaire grâce à ses décisions et à ses choix militaires. Ses nombreuses victoires sur le front lui ont permis de devenir un homme puissant dans l’armée. Grâce à ce prestige, il a pu devenir une figure politique, notamment comme député en Aveyron. Toutefois, c’est un homme contesté en raison de sa religion et de ses idées politiques. Les acteurs notamment républicains l’ont discrédité malgré le soutien du peuple pour qu’il n’est pas le titre de maréchal.