Les œuvres de Philippe Pinel

La Nosographie Philosophique (1798) : le classement des maladies mentales

La Nosographie philosophique, Philippe Pinel, 1797. Source : openlibrary.org

La nosographie est une description et classification méthodique des maladies. Philippe Pinel publie sa première nosographie en 1798 intitulée Nosographie Philosophique. Dans cette oeuvre, Philippe Pinel classe dans un chapitre ce qu’il appelle les vésanies, soit les troubles mentaux, à partir de ses observations sur ses patients réalisées dans les établissements Bicêtre et la Salpêtrière. Pour lui, la nosologie (la science permettant la classification) ne peut se fonder que sur la base du comportement du patient, car il n’existe pas de lésions spécifiques dans le corps pour chaque maladie mentale. Il classe celles-ci du trouble le plus commun au plus perturbé en les énonçant de manière simple et claire : les mélancolies, les manies (avec ou sans délire), les démences (soit la détérioration de l’intelligence) et l’idiotie soit l’abolition totale des fonctions de l’entendement. Il se distingue de ses prédécesseurs car il ne se fonde pas sur des symptômes pour construire sa classification mais plutôt sur les organes sur lesquelles ces maladies provoquent des lésions. Cet effort de classification montre une première démarche de médecine clinique : il se réfère par ses propres observations et non pas sur une médecine empirique. Cette nosographie va ouvrir la voie à son plus grand ouvrage : le Traité Médico Philosophique.

Le Traité Médico Philosophique sur l’aliénation mentale (1800) : d’un traitement physique à un traitement moral

 

Traité Médico Philosophique sur l’aliénation mentale ou la manie, Philippe Pinel 1800
Source : pba-auctions.com

Le Traité Médico Philosophique sur l’aliénation mentale, ou la manie est l’œuvre majeure de Philippe Pinel. C’est dans cet ouvrage, paru pour la première fois en 1800, que ce médecin tarnais expose son concept novateur d’aliénation mentale. Pour réaliser cet ouvrage, et construire les bases de ses théories, il s’est inspiré de nombreux intellectuels issus plusieurs domaines de recherches : de botanistes, de philosophes, de médecins de l’antiquité comme Hippocrate le père de la Médecine. C’est en ayant étudié une multitude d’auteurs, par ses expérimentations et ses observations, notamment à la pension Belhomme, qu’il parvient à élaborer ses propres travaux sur la folie. Ce qui est novateur dans cet ouvrage, c’est que Philippe Pinel part du principe que le malade est un être raisonnable et que sa raison est prisonnière de la maladie. En effet, au XVIIIe siècle, on pensait que le fou était un être déshumanisé puisque dépourvue de raison : il n’est plus capable d’avoir de pensées rationnelles, totalement soumit à ses pulsions et ne fait pas la différence entre la réalité et la fiction. Le docteur Pinel affirme que l’aliéné est un homme malade que l’on peut soigner et que son état n’est pas fatal. Pinel est convaincu d’une chose : les maladies mentales ne sont pas infligées aux fous. Pour lui, ce sont les émotions fortes comme la peur ou la colère qui provoquent les troubles mentaux. Pour soigner l’aliéné, il préconise ce qu’il appelle « le traitement morale ». Cette méthode consiste à faire appelle à la moralité du patient pour qu’il retrouve la raison. Il faut que le patient, grâce à sa morale, se rende compte de son état pour qu’il retrouve la raison perdue. Pour y parvenir, le médecin se doit d’être bienveillant pour servir de modèle à son sujet, mais tout en faisant preuve d’autorité. Pour Philippe Pinel, ce n’est pas en infligeant aux malades des traitements brutaux comme les saignées ou l’administration de drogues que l’on parvient à sa guérison.

Cette œuvre a connu un certain succès et a fait l’objet, au cours du XIXe siècle, de nombreux débats car elle a ouvert un nouveau regard sur le fou et sa maladie.