L’Abbaye Saint-Michel de Gaillac [2020]

L’abbaye Saint-Michel à Gaillac
crédits: E.Delamotte

Gaillac, dans le sillage de la règle bénédictine

Inscrite dans le paysage médiéval depuis 972, l’abbaye Saint-Michel (fondation du patrimoine) domine la rive gauche du Tarn. À son apparition, le bourg de Gaillac, est principalement organisé autour de l’abbaye. Cette dernière est régie par la règle bénédictine. Généralisée, depuis 817 à l’initiative de Louis le Pieux et Benoit d’Aniane, elle a pour fin d’organiser la pratique religieuse de l’ordre monastique. L’abbaye Saint-Michel n’a pas été passive dans le paysage gaillacois. En effet, l’abbé s’est vu confier l’intégralité de pouvoirs seigneuriaux du bourg.

L’association des pouvoirs spirituel et temporel s’est faite au profit des Gaillacois. À partir de là, l’abbaye est gérée comme une seigneurie, dont l’abbé est le seigneur. Les moines s’organisent autour de divers domaines afin de faire fructifier la seigneurie ; tel que le vin ou encore le maraichage. Aujourd’hui Gaillac doit en partie la notoriété de son vin aux moines. Ainsi, l’abbé et les moines s’acquittent de l’économie du monastère et continuent leurs activités ecclésiastiques. Gaillac connait une certaine prospérité notamment matérielle. Mais suite à un relâchement de la discipline monastique, l’abbaye se voit rattachée à l’abbaye de la Chaise Dieu. Cela met fin au particularisme local, incarné par l’abbaye. La prospérité économique de l’abbaye ne s’en voit pas pour autant ébranlée durant l’ensemble du XIe siècle.

Photo prise à l’intérieur de l’abbaye (google image)

Entre perte d’indépendance et usurpations : une ère de prospérité mise à mal

Lorsque Gaillac a été rattaché à l’abbaye de la Chaise Dieu, c’est en parallèle de la réforme grégorienne. À l’initiative du pape Grégoire VII, elle a pour but de réformer le clergé afin de « rétablir la discipline et corriger les mœurs des clercs ». Entre 1079 et 1175, la prospérité gaillacoise est ébranlée ; d’abord à cause d’un contexte général aux prises d’une remise en question de la société, comme l’exprime la réforme grégorienne. Le rattachement à l’abbaye de la Chaise Dieu a donné lieu à une confrontation entre les comtes de Toulouse et d’Albi et l’abbé et sa confrérie de moines. Ces derniers auraient préféré être rattachés à l’abbaye de Cluny, alors en plein essor.

La prospérité de Gaillac fut ensuite ébranlée par des usurpations féodales à répétition qui ont accaparé l’abbaye. À ce moment-ci, le pouvoir ecclésiastique se révèle être puissant mais aux prises des seigneurs laïcs. Ces derniers usent de leurs pouvoirs et amputent une partie du territoire ecclésiastique. Peu à peu l’ordre monastique est dépouillé de ses biens. Bien que récupéré par la suites, l’abbé a continué de perdre son pouvoir temporel, toujours au profit des seigneurs laïcs. Après 1175, l’abbé de Gaillac est obligé de céder l’intégralité de ses droits seigneuriaux.

Photo de l’abbaye de Gaillac, prise de sur le pont google image

La fin d’un temps : scission entre Gaillac et son abbaye

Du début du XIIIe siècle jusqu’au XIVe siècle, la ville de Gaillac est en proie à la déchéance.

Une guerre est menée contre les albigeois, entre 1209 et 1229 ; dont le but était que le Pape récupère l’autorité sur les hérétiques. De plus, des querelles existent entre les comtes de Toulouse et leurs vassaux, la paix est signée en 1229.  Depuis de nombreuses années, la ville des Gaillacois été rattachée à des comtes. Mais en 1256, après s’être séparée de l’évêque d’Albi, elle décide de se disjoindre des comtes de Toulouse. Elle devient donc indépendante. Quelques années plus tard, le roi Louis X rend la seigneurie indissociable du domaine royal dès lors Gaillac est sous l’autorité directe du roi. Donc l’abbaye n’a plus le gouvernement sur la ville, mais elle reste un élément majeur dans son développement, comme  la brique ou le vin.

Certains événements ont mis fin à la gloire de Gaillac.  Pour lutter contre les invasions extérieures, comme les Anglais ; les Gaillacois et plus particulièrement les bergers et cultivateurs, ont décidé de délivrer leurs terres des mains des infidèles. Ces terres sont arrachées à des gens de diverses religions et sont ensuite christianisées. Elles deviennent des chemins empruntés par les pèlerins, lors de pèlerinages.

Le passage des Pastoureaux est aussi appelé la seconde croisade des Pastoureaux. Ils font le tour de la France, du nord au sud pour crier leur mécontentement. Ils représentaient une grande menace pour les juifs français. En effet, des communautés juives sont détruites, notamment à Gaillac et Rabastens.  De plus, ils pillent les biens des habitants et sèment le désordre. Le comte de Toulouse décide d’agir et envoie une troupe armée afin d’en capturer un grand nombre. Il tente de mettre fin à ce phénomène désastreux. Les Pastoureaux sont écrasés par le Sénéchal, à Carcassonne. Les Albigeois, tout comme les Gaillacois, ont fortement souffert de cette croisade populaire. Ainsi, le rayonnement de Gaillac décline fortement en 1320, et prend fin après l’invasion anglaise de 1381.

ZOOM SUR : La ville médiévale

Plan de Gaillac avec ses fortifications et ses faubourgs, Histoire de Gaillac depuis l’an 654 jusqu’à l’an 1789, Frédéric Hugonet, 1840

Aujourd’hui le cœur historique de Gaillac est concentré autour de l’abbaye. En effet, cela témoigne du caractère attractif de l’abbaye. Ces quartiers regroupent diverses caractéristiques médiévales, telles que l’étroitesse des rues ou encore les maisons à Colombage. L’étalement urbain s’est fait autour de l’abbaye. Nous savons aussi que l’enceinte est un élément important à cette époque. Et en ce qui concerne celle de Gaillac nous n’avons pas de date arrêtée de sa construction, elle fut construite entre la fin du XIIe siècle et le début du XIIIe siècle ; c’est-à-dire au moment de l’apogée de l’essor urbain. Mais encore à ce jour il est très difficile de l’étudier, car il y en a que peu de traces. L’enceinte délimitait la ville comme un lieu sacré dont l’évêque était le chef temporel. Pour Gaillac l’abbé occupait ce statut. La ville de Gaillac est la matérialisation même de la ville épiscopale à l’époque médiévale. Aussi, par le biais de l’enceinte l’abbé représentait la protection et la défense de la ville.

Pour aller plus loin

Travail de Orsal Lucie (L2) et Sembrès Pauline (L1).