Najac (milieu du XIIIe – fin XIVe)

En 1229 la rédaction du traité de Maux-Paris mets fin à la croisade des Albigeois et place le roi de France en grand vainqueur de ce conflit. En effet ce dernier impose au comte de Toulouse de ne plus pouvoir construire de place forte sur son territoire, de plus il réussit également à marier son frère (Alphonse de Poitiers) à la fille du comte, Jeanne de Toulouse. Ce qui a la mort du comte de Toulouse fait rentrer le comté dans le territoire royal. L’arrivée de la puissance royal dans le comté de Toulouse est plus particulièrement dans la province du Rouergue mené à des changements durables sur ce territoire. C’est dans ce contexte que va se développer le bourg castral de Najac (village fortifié du Nord- Ouest du Rouergue construit autour d’un château érigé par les comtes de Toulouse).

Alphonse de Poitiers (1220-1271), comte de Poitiers (1241-1271) et de Toulouse (1249-1271). Reproduction faite par Henri Decaisne.

Nous pouvons donc nous demander « comment le bourg castral de Najac s’est imposé comme une puissance régionale dans le Rouergue au XIIIe siècle ? ».

Afin de répondre à cette problématique nous verrons dans un premier temps l’arrivée de la puissance royale à Najac avec l’érection de la forteresse et la construction de l’église Saint-Jean qui réaffirme la présence de l’Église dans la province suite à l’hérésie cathare. Dans un second temps nous verrons que Najac est une puissance notable durant le XIIIe siècle à la fois sur le plan militaire et économique. Enfin nous verrons comment Najac subit la montée en puissance de Villefranche-de-Rouergue et la prise par les Anglais durant le XIVe siècle.

L’arrivée de la puissance royale (1229-1253)

Le royaume de France à la mort de Philippe Auguste (Wikipédia)

Au XIIe siècle les comtes de Toulouse qui règnent alors sur ce territoire décident d’y établir leur forteresse du Rouergue. L’endroit choisi est Najac qui a une position stratégique parce que nous sommes à l’intérieur du comté de Toulouse, à la frontière du royaume de France vers le Nord et du royaume d’Angleterre à l’est avec l’Aquitaine.

Alphonse de Poitiers, frère du roi Louis IX décide alors de remanier le château pour en faire une forteresse royale. Arrivée a Najac Alphonse de Poitiers doit s’imposer dans le Rouergue. Il a la volonté d’imposer la puissance capétienne à Najac alors indépendante.

La forteresse a de nombreux éléments défensifs afin de repousser ses ennemis. L’historien Francis Salet nous avait déjà, en 1937, éclairé sur l’histoire du château, ainsi que sur ses particularités. Tout d’abord dû à sa hauteur les portes ne peuvent pas être défoncé par un bélier. Chaque porte est protégée par une herse qui descend dans un rail de pierre. Entre la herse et la porte il y a une fente qu’on appelle à l’époque assommoir mâchicoulis. Ensuite il y a les hauts murs et remparts de la forteresse ne permettent pas aux assaillants de passer par-dessus. L’élément phare de la forteresse de Najac est le donjon qui est la caractéristique défensive essentielle du Moyen-âge mais c’est aussi un outil de communication pour montrer la puissance du comte de Toulouse. De plus le donjon a des yeux avec ses archères, ses meurtrières de 7m d’ouverture verticale. Alphonse de Poitiers par ses meurtrières permet à son donjon de ne pas avoir d’angle mort et ainsi montrer que sa forteresse est puissante et imprenable.

La forteresse de Najac (Office de Tourisme Ouest Aveyron)

Alphonse de Poitiers va mener alors une politique d’urbanisation dans le Sud-Ouest puisque sur 300 villes nouvelles créer en France au XIIIe siècle il va en créer 50 en seulement 20 ans (comme Villefranche de Rouergue). La construction de la forteresse de Najac démontre les lents mais irrésistibles progrès d’unification du royaume réalisés par la puissance royale au cœur des provinces alors les plus reculées.

A la mort du compte de Toulouse (1249), les Najacois refusent et se révoltent contre la domination capétienne, ils refusent également de prêter serment au nouveau comte. Alphonse de Poitiers ordonne aux inquisiteurs de condamner les habitants Cathares. Les condamnations de l’inquisition peuvent être une simple amende, dans un cas extrême, mener au bûcher. Sinon ils participent à des pèlerinages pour se repentir. Ceux qui ne participent pas aux pèlerinages, doivent participer au financement de l’église Saint-Jean.

Église Saint-Jean de Najac (XIIIe siècle)
Cliché personnel

Quant aux autres, ils participent à la construction. Najac deviendra une ville en 1258 grâce à la construction de l’église. Alphonse de Poitiers souhaite une église plus grande et plus imposante qui marquera au fer rouge sa toute puissance et celle de Najac. Elle tient pour mesure, une hauteur de dix-sept mètres, une longueur de quarante-cinq mètres, une largeur de onze mètres. L’église Saint-Jean est une église gothique, possédant un cloché hexagonal et une chapelle latérale construite au XIVe siècle. Entre 1274 et 1282, la confrérie de Saint Jaques décide de construire un hôpital en face de l’église. L’hôpital fonctionne jusqu’au XVIIe siècle mais se voit vendu comme bien national, avant de devenir une maison.

Une puissance notable dans le Rouergue (1253-1368)

Maison du gouverneur, Najac
Cliché personnel

La puissance militaire de Najac s’illustre par la présence de nombreuses fortifications dans tout le village. En effet le bourg castral en lui-même comporte plus d’une vingtaine de porte ainsi que de nombreux éléments de défense qui avaient pour but d’interdire l’accès à la forteresse aux potentiels visiteurs hostile.De plus cette puissance est incarnée par la présence du gouverneur (qui est un officier royal qui a pour rôle de maintenir l’ordre dans la région). Pour appuyer la présence de cet officier une garnison est également présente dans le bourg castral afin de veiller à la défense de la forteresse ainsi qu’au maintient de l’ordre. Najac est donc une place primordiale dans le commandement des troupes royales dans la province du Rouergue à l’époque.

Cliché représentant la place du marché du village et de la forteresse de Najac
Image de l’office de tourisme de Najac.

La puissance commerciale de Najac lui vient principalement de deux facteurs. Le premier est sa proximité avec des ressources naturelles très riche et le second est sa position géographique très avantageuse. Pour ce qui est des ressources naturelles. Elles s’incarnent principalement dans les nombreuses mines de cuivre et d’argent présente sur tout le territoire autour du bourg castral. Exploitées depuis l’époque gallo-romaine ces mines font de Najac une place qui a su se spécialiser dans l’utilisation des matières premières autour d’elle (de nombreux quartiers se spécialisent en devenant des zones de transformation des métaux). Quant à sa position géographique avantageuse Najac se situe a un carrefour entre différentes provinces (Quercy, Rouergue et l’Albigeois) ce qui permet au bourg castral d’avoir énormément des voyageurs qui transite par Najac. De nombreuses foires s’organise alors dans le village (une fois par mois d’après les sources). Ce qui assure la prospérité économique de Najac durant le XIIIe siècle et le XIVe siècle.

La transmission du pouvoir vers Villefranche de Rouergue (1368-1380)

Durant le XIVe siècle, Villefranche est très tourné vers l’économie. Son accès direct à l’Aveyron lui facilite ses échanges commerciaux. Villefranche est géographiquement mieux placé que Najac, ce qui donne un avantage considérable en matière d’économie de marché. La maison du Sénéchal, se situait à Najac. La saisie de deux maisons pour hérésie à permis la construction de la maison Consulaire en 1276.

Maison du sénéchal, Najac
Cliché personnel

C’est grâce aux consuls que naît cette maison, et une nouvelle place pour le marché inauguré en 1316. Cependant en 1369, les Anglais occupent Villefranche. Son activité économique est en plaine floraison et devient en dépit de Najac, le nouveau siège de la sénéchaussée en 1370. Villefranche devient donc la capitale économique, administrative et judiciaire. En mai 1369, les principaux privilèges de Villefranche sont confirmés par les lettres du Duc d’Anjou et par Charles V, le 21 juin 1370. Par ces lettres le siège du sénéchal, du juge-mage et du trésorier de la sénéchaussée de Rouergue sont fixés à Villefranche. En décembre 1371 est créé à Villefranche un atelier monétaire royal qui existera jusqu’en 1566. Najac demeure jusqu’en 1370 le chef-lieu de la sénéchaussée de Rouergue, s’étendant sur le territoire de six cantons actuel de l’Aveyron et du Tarn et Garonne année ou le siège du Sénéchal est déplacé à Villefranche de Rouergue.

Najac va connaître un long déclin. Ce déclin commence à la fin du XIVe siècle avec la guerre de cent ans (1337-1453), lorsque le bourg tomba entre les mains des Anglais. Pendant dix ans, les Anglais occupent le territoire et son château. D’après les écrits un soir, les Najacois vont se révolter face à la menace anglaise et réussissent à pénétrer dans le château par ruse. Ils vont tuer la garnison anglaise et récupérer le château. Il faut savoir que lorsque les Capétiens prirent le pouvoir sur le comté de Toulouse par le mariage d’Alphonse de Poitiers avec l’héritière du comté Jeanne de Toulouse, l’ancienne capitale administrative du Rouergue, Najac, siège de la sénéchaussée du Rouergue, fut jugée trop fidèle à l’ancienne dynastie Raymondine. Alphonse de Poitiers décida de créer une ville nouvelle afin d’y transférer le siège de son administration, afin de casser les anciennes allégeances. Il fonda donc Villefranche-de-Rouergue en 1252. Najac va être alors victime d’un abandon progressif de la ville. Au XIV il y a entre 5000 et 6000 habitants à Najac, Au fil des siècles la ville connaît un déclin démographique et par conséquent économique et ce phénomène va exister jusqu’à aujourd’hui.

Pour conclure, Najac grâce à Alphonse de Poitiers comte de Toulouse va connaître une puissance à tous les niveaux. La ville de Najac est marquée par sa puissance militaire avec sa forteresse et tous les éléments défensifs de la ville, sa puissance commerciale avec ses nombreux marchés, la région qui regorgent de richesses, sa position stratégique pour le commerce et enfin une puissance religieuse avec la construction de l’Église Saint-Jean. Grâce à tout cela Najac a réussi réellement à s’imposer comme une puissance régionale dans tout le Rouergue au XIIIe siècle avant de décliner à partir du XIVe siècle avec l’occupation anglaise et le déplacement de la sénéchaussée vers Villefranche de Rouergue.

Affiche des médiévales de Najac (édition 2019)
Page Facebook de l’association.

Au fil des siècles Najac a subi un déclin démographique suite au déplacement de cette sénéchaussée qui a entraîné progressivement une baisse de puissance sur le plan militaire, commercial et religieux. De nos jours Najac vit essentiellement du tourisme. En effet pendant l’été Najac accueille un festival médiéval qui montre la volonté de se rattacher à l’héritage médiéval du village.

Bibliographie

Étudiant(e)s : Panissal Paul (L2) / Jean Théo (L2) / Newerkowitsch Laure (L1)