L’apogée de l’industrie mazamétaine au XIXe siècle [2017]

CAZALS, Rémy, Cinq siècles de travail de la laine: Mazamet, 1500-2000.

Situé au pied de la Montagne Noire dans le département du Tarn, Mazamet a connu une période très attractive dans le domaine de l’industrie notamment au milieu du XIXe siècle avec l’apparition du délainage. Le terme délainage désigne une technique qui consiste à « séparer la laine de la peau brute du mouton, afin de les utiliser séparément ». Cette activité locale a permis à la ville de se développer et de devenir un centre industriel et commercial, qui s’est étendu au niveau mondial. En effet, pour répondre à la demande croissante, les industriels mazamétains ont commencé à importer de la laine dans différents pays. Le bassin mazamétain a donc porté le délainage au niveau international à partir de 1951. Même si la zone géographique n’était pas spécialement favorable pour son commerce, elle l’était pour la conception du délainage grâce à son enclavement et ses nombreux cours d’eau. En effet, pour importer et exporter, des dépenses de transports conséquents sont nécessaires. Cependant, la ville de Mazamet affirma très tôt cette vocation industrielle et est donc très spécialisée dans ce domaine. Le développement de cette industrie à permis de stimuler l’emploi local, et d’apporter une certaines richesses. De plus, l’infertilité des sols obligea les mazamétains à trouver dans l’industrie du textile un moyen de s’ouvrir au monde et de « s’épanouir » économiquement.

Comment la ville de Mazamet a-t-elle réussi à obtenir le quasi-monopole mondial de l’industrie du délainage au XIXe siècle?

L’industrie de Mazamet s’est développée dans une région propice à l’activité. Tout d’abord, le village d’Hautpoul qui surplombe Mazamet est depuis le Moyen-Âge une place stratégique de marché. Le bois et la laine de mouton étaient déjà des éléments clés du commerce de la région. De plus, l’Arnette, la rivière qui traverse Mazamet, actionne moulins et usines depuis plusieurs siècles. En 1851, l’industrie du délainage voit le jour, mais ne peut pas s’élargir du fait du manque de laine. En effet, la laine de mouton provenant des régions proches : la Provence, le Languedoc ou même l’Espagne, ne suffisent plus.

Pierre-Elie HOULES Archives départementale du Tarn

C’est Pierre-Élie Houlès (1790-1851), industriel mazamétain qui décida de s’approvisionner ailleurs pour répondre aux besoins constants des entreprises. C’est en Argentine qu’il va démarcher des balles de laine, du fait de ses importants élevages de moutons, notamment en Patagonie. Une fois la matière première trouvée et acheminée jusqu’aux usines, il faut pouvoir la travailler. De cette manière, le « délainage à l’échauffe » est mis en place. C’est une technique qui consiste à séparer la laine du cuir sans l’endommager. Bien que Pierre-Élie Houlès soit à l’origine de l’entrée des balles de laine d’Argentine à Mazamet et que son gendre ait repris l’affaire ensuite, c’est à Gaston Cormouls-Houlès que l’on doit le surnom de la ville: « la capitale mondiale du délainage ».

L’activité industrielle vers 1850 reste la même à la fin du XIXe siècle. Mais, elle est dominée par « cette jeune et vivante industrie du délainage, à peine âgée de quarante ans et qui a fait de Mazamet un des centres de production de laine le plus connu du monde entier ». Les marchés d’origine étaient limités au pays de la Plata, c’est-à-dire de l’Argentine, puis, ils s’élargissent à l’Australie en 1890 et à l’Afrique du Sud en 1896. C’est dans la capitale argentine, Buenos Aires, que se trouve le plus grand nombre de comptoirs d’achat et de nombreux mazamétains y vivent. Notamment, Albert VIDAL, issu d’une famille de la bourgeoisie lainière protestante, connaît le milieu lainier et l’Argentine. Il nous indique que les ouvriers sont payés 1000 francs pour traiter la laine, et qu’une fois le produit fini, il pourra rapporter plus du double.

CAZALS, Rémy, Cinq siècles de travail de la laine: Mazamet, 1500-2000.

Depuis la Révolution industrielle, la classe ouvrière est considérée comme un acteur indispensable de la création des richesses. Cependant, ces ouvriers sont victimes de redistribution inégale. Les catholiques sont nombreux parmi les ouvriers et les protestants constituent la majorité du patronat. Pour ce qui est des conditions de travail, en 1843, les ouvriers effectuent un travail de 14h puis de 12h par jour.
Le travail de nuit existe, généralement effectué par les femmes sur des tâches qui n’amènent pas spécialement de fatigue corporelle comme le triage de la laine ou le bobinage à la main. La classe ouvrière de Mazamet connaît dans la première moitié du XIXe de longues journées et faibles salaires, travail des enfants, logement étroit et insalubre. Cependant la bonne marche des affaires, la montée du syndicalisme et des grèves permettent l’augmentation des salaires après 1851 et contribuent à maintenir la « paix sociale ». Le délainage met son empreinte sur le paysage de tout le bassin. Il transforme les usines existantes (textile), et il en crée d’autres (délainage).

On peut dire que la ville de Mazamet à su s’imposer dans l’industrie du textile et surtout dans l’industrie du délainage. Pendant le XIXe siècle, le bassin mazamétain était déjà marqué par l’apogée du textile. Cependant il connaît dans sa seconde moitié un déclin net laissant place à l’industrie du délainage qui a su s’affirmer en France et à l’international. Créateur de richesse, les ouvriers du textiles ont une place importante dans l’industrie et Mazamet fut la seule et unique ville à pratiquer ces procédés de délainage et s’este inscrit dans l’histoire de l’industrie.

Bibliographie