UN GARDE DU CAMP « CHARLES DUVAL »

Etudiantes : Caputo Christelle, Gaillardin Julie, Lehy Madeline

Sa vie avant le camp

Emile Duval est un jeune français, tout juste âgé de 20 ans lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate. Son père a été mobilisé en septembre 1939 lors du déclenchement de la Deuxième Guerre mondiale. Emile étant trop jeune pour être mobilisé, il est appelé un an plus tard dans les Chantiers de la Jeunesse Française, mis en place par le régime de Vichy quelques mois auparavant. Il passe six mois dans un chantier en Auvergne, et en sort à la fin de mars 1941.

Affiche présentant les chantiers de la jeunesse française – Lieu de conservation inconnu

Avant de partir en Auvergne, il vivait avec sa famille dans un petit village de l’Aveyron (Combret). Issu de la classe moyenne, notre personnage est un artisan ébéniste. C’est donc lui qui devait subvenir aux besoins de sa famille (sa mère et ses 3 frères/sœurs) lorsque son père est parti à la guerre.

Carte postale du village de Combret en Aveyron (coll.privée)

Comme sa famille, il est plutôt de sensibilité politique de droite et, comme beaucoup de Français à l’époque, il accueille plutôt favorablement l’arrivée du maréchal Pétain. Par la suite, quand le régime de Vichy s’installe, il est toujours en accord avec la politique mise en œuvre, l’idéologie traditionnelle, la Révolution nationale, voire même quelques idées de l’idéologie nazie.

Une nouvelle vie professionnelle

En novembre 1940, de nombreux appels à candidature sont passés dans la presse locale, car un manque crucial d’employés dans les camps d’internements se fait sentir. Toutefois, pour accéder à ce poste, plusieurs conditions sont nécessaires (par exemple déclarer sur l’honneur de ne pas être juif, comme c’est le cas pour l’ensemble de la fonction publique…).

Emile Duval sort du chantier de Jeunesse fin mars 1941 et c’est ce même mois qu’il décide de faire une demande d’emploi. Pour cela, il doit remplir une notice individuelle qui contient de nombreuses informations telles qu’un engagement sous serment, son niveau d’instruction, son état de santé, ses opinions… il doit également remplir les renseignements d’ordre civil (situation de famille, sa profession).

Un mois plus tard, sa candidature est acceptée. On l’informe qu’il est affecté dans le groupe 369, en qualité de surveillant dans le camp d’internement de Septfonds où il arrive quelques jours plus tard, via la gare de Caussade.

Carte postale de la gare de Caussade (coll. privée)

Découverte du camp et quotidien de Charles

Lorsque Emile arrive au camp, c’est un endroit encore tout nouveau pour lui. Il est surpris par sa superficie (50 hectares). Au début, il est choqué par les conditions de vie des prisonniers, puis il s’y habitue et commence à trouver cela normal, « c’est la guerre », se dit-il.

Entrée du camp de Septfonds (coll. privée)

Quand on lui fait visiter le camp, on lui explique sa principale mission : encadrer les travailleurs étrangers, réfugiés en France et à qui on demande, en échange de leur accueil, des prestations professionnelles.

On lui apprend que certains gardes sont logés à l’extérieur du camp, principalement ceux qui ont de la famille (dans les fermes avoisinantes, villages ou communes voisines). Lui est logé à l’intérieur du camp. C’est l’occasion pour lui de rencontrer de nombreux gardes, notamment un « ancien » du camp qui lui raconte pourquoi et comment il a été créé.

Les journées sont assez monotones. Une journée ‘‘type’’ pour Emile débute au son du clairon le matin. Puis, vers 8 heures les officiers se réunissent, et passent dans les baraquements pour assurer la surveillance interne du camp. Durant la journée, les chefs de groupes ont la charge de surveiller les TE (Travailleurs Étrangers) et de les encadrer dans leurs travaux extérieurs par exemple les travaux dans les champs.

Évolution de carrière

C’est en septembre 1942 que Emile est promu et devient chef de groupe. Les motifs qui expliquent cette promotion sont une conduite exemplaire, ainsi que le non-renouvellement du contrat de son prédécesseur pour des raisons de santé. Dès lors, il s’occupe exclusivement d’un groupe d’hommes, de nationalités variées (Espagnols, Allemands, Autrichiens…) et reprend les mêmes méthodes de travail que son prédécesseur, à savoir peu de tolérance et quasiment pas d’états d’âme.

Au fil du temps, la Résistance autour de l’occupation allemande s’accentue et les mouvements se multiplient (à partir des rafles d’août 1942, de nombreuses évasions ont lieu). Charles voit tout cela d’un mauvais œil et ne comprend pas pourquoi des Français veulent aider des « indésirables ».

Camp de Septfonds avec les Travailleurs Étrangers et leurs surveillants. (coll. privée).

 Un incident se produit en janvier 1943. En effet, un groupe de travailleurs juifs, sous sa responsabilité part travailler dans les champs et deux détenus parviennent à s’évader et un seul est finalement retrouvé.

En tant que chef de groupe, il est sévèrement réprimé : de nombreux reproches lui sont adressés et et le commandement de son groupe est donné à un autre pendant un mois…

Cet évènement va, par conséquent, bouleverser sa vision d’encadrer les prisonniers et devient encore plus intransigeant.

Avis divergents et fin de sa carrière

Quelques mois plus tard, en juin-juillet 1943, Emile Duval est confronté à des personnes qui ont des avis différents du sien. Notamment une infirmière présente dans le camp, qui trouve que les conditions de vie, de travail des internés sont déplorables. Emile Duval répond que les prisonniers peuvent ‘‘survivre’’ et s’adapter.

Les chefs de groupe sont autorisés à sortir du camp, Duval en profite alors pour prendre du recul, car il y a bel et bien une vie à l’extérieur. Il va donc au village, avec d’autres chefs et se retrouvent dans un café pour parler de la guerre, entre autres.

La vie des internés devient de plus en plus difficile, lorsqu’en février 1944 le camp est attaqué par la Résistance, mais n’est pas libéré.

Durant le mois d’avril 1944, Duval a eu une altercation avec un personnage qui a réellement existé dans le camp de Septfonds : le capitaine Thébaut, commandant du GTE 533, sur la question des Travailleurs Étrangers. En effet, Thébaut était favorable à la libération des TE internés depuis plus d’un an, alors que Charles ne l’était pas. Après de multiples péripéties, Thébaut a fini par donner sa démission.

La question de la libération des travailleurs des camps est récurrente au plus haut niveau. En 1944, les libérations peuvent être décrites par certains comme abusives, puisque beaucoup considèrent que les prisonniers ont mérité leur place, et ne doivent donc pas être libérés.

C’est en août 1944, que les choses changent. Le 19 août, les résistants attaquent le camp et permettent sa libération. Charles est fait prisonnier, ainsi que 500 autres personnes soupçonnées de collaboration dans le département. C’est en mai 1945 qu’il est finalement libéré.

Groupe de résistants français – coll. privée.

Bibliographie indicative