« J’accuse »: au cœur de la polémique.

Le 13 Novembre dernier est sorti “J’accuse” un film de Roman Polanski sur l’affaire Dreyfus. La sortie du film ne s’est pas fait dans le plus grand des calmes puisque quelques jours avant ont surgi de nouvelles accusations de viols à l’encontre du réalisateur franco-polonais. A la lumière des événements peut-on, comme le dit Télérama, “évoquer J’accuse d’un seul point de vue esthétique?”, peut-on séparer l’homme de l’oeuvre?

  • Un peu de contexte :

Le 3 novembre 2019, l’actrice Adèle Haenel, dans une enquête de mediapart puis une vidéo,  accuse le réalisateur Christophe Ruggia d’attouchement et harcèlement sexuel alors qu’elle était âgée de 12 à 15 ans. suite a ces révélations d’autre femmes parlent dont la photographe Valentine Monnier qui va accuser Roman Polanski de l’avoir violé et frappé en 1975 quand elle avait 18 ans. Elle raconte dans un texte publié dans “Le Parisien” :

« En 1975, j’ai été violée par Roman Polanski. Je n’avais aucun lien avec lui, ni personnel ni professionnel, et le connaissais à peine. (…) Ce fut d’une extrême violence, après une descente de ski, dans son chalet, à Gstaad [Suisse]. Il me frappa, me roua de coups jusqu’à ma reddition puis me viola en me faisant subir toutes les vicissitudes. Je venais d’avoir 18 ans et ma première relation seulement quelques mois auparavant. Je crus mourir. »

La promotion du film a été entaché par ces accusations et plusieurs interviews ont dû être annulées. 

  • Une réception contrastée:

Le mardi avant la sortie du film des féministes ont bloqués l’avant-première dans un cinéma parisien en manifestant devant le cinéma avec des pancartes et slogans comme “Polanski violeur, cinémas coupables”, ou encore “J’accuse: Polanski violeur”.

Mobilisation devant l’entrée du cinéma Le Champo dans le Quartier latin, à Paris, le 12 novembre. CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

Beaucoup de collectifs féministes ont appelé à boycotter le film.

Mais d’un autre côté le film a connu un bon succès. Il a notamment réalisé le troisième meilleur démarrage à Paris intramuros pour un film français depuis le début de l’année, selon des informations recueillies par franceinfo. Il a aussi été récompensé par le grand prix du jury à Venise et les critiques du masque et de la plume sont unanimement conquis par le film.

 

  • L’homme et son oeuvre : 

La même question revient dans beaucoup de débats: faut-il séparer l’homme de son oeuvre? C’est une question qui s’est déjà posée pour d’autres artistes comme Michael Jackson ou Bertrand Cantat. Il est nécessaire de faire la part des choses. Aller voir un film de Polanski ce n’est pas être pour le viol ou les agressions sexuelles. Le monde n’est pas manichéen, divisé en deux parties : le bien et le mal. Mais il est quand même difficile d’ignorer les actes du réalisateur et de faire comme si rien n’était. On ne peut pas aller voir ce film sans ignorer les actions de celui qui l’a réalisé.
Dans une interview pour France Inter, Sibeth Ndiaye, porte parole du gouvernement, déclare qu’elle n’ira pas voir le film car

“j’ai besoin quand je vais assister à un spectacle de partager quelque chose avec celui qui l’a créé. Je ne crois pas partager grand-chose avec un homme qui porte de telles accusations sur lui.”

Il n’y a pas de réponse universelle à la question “faut-il séparer l’Homme de l’artiste?”. Chacun est libre de faire ce qu’il lui plait mais personne ne doit/peut ignorer les accusations portées contre Polanski ou tout autre artiste accusé de faits similaires. Depuis le mouvement MeToo on voit la parole se libérer de lus en plus. Il est important que les victimes sortent du silence?

Maëlle Sanguinet