Le 16 Octobre dernier, le Parlement a définitivement validé la création du Centre National de la Musique (CNM) qui verra le jour en janvier 2020 alors que son homologue pour le cinéma (CNC) existe depuis 1946. La création d’un établissement public pour soutenir la création musicale avait déjà été évoqué durant la présidence de Nicolas Sarkozy, l’initiative a été abandonnée par François Hollande puis évoquée de nouveau sous Emmanuel Macron.
Une « maison commune » pour la musique
Le Centre National de la Musique prendra le statut d’un EPIC (Établissement Public à caractère Industriel et Commercial) et sera placé sous tutelle du Ministère de la Culture, son lieu d’implantation n’a encore pas été décidé. Il a vocation à rassembler le Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV), le Fonds pour la création musicale (FCM) et le Centre d’information et de ressources pour les musiques actuelles (IRMA). Ces structures seront rejointes par le Bureau des exports de la musique française (Burex) et le club actions des labels et disquaires indépendants français (CALIF). Il interviendra dans les secteurs du spectacle vivant, de la musique enregistrée, en soutien à la création notamment par des dispositifs financiers d’expertise et aussi comme observatoire de la profession. Le Centre aura la possibilité par la suite de nouer des partenariats avec les collectivités territoriales.
Un budget conséquent mais…
Selon le projet de loi de finances pour 2020 le Ministère de la Culture prévoit d’accompagner la création du centre par la mobilisation de 7,5 millions d’euros de moyens nouveaux. Il devra gérer le fruit des crédits d’impôts perçus par la profession (30 millions d’euros). Les autres ressources proviendront de la taxe sur les spectacles de variétés (35 millions), les subventions publiques (7 millions) et la contribution des organismes de gestion collective (environ 6 millions d’euros). Hors dans un contexte de restriction budgétaire qui impacte en premier lieu la culture, les crédits supplémentaires d’un montant 7,5 millions d’euros sont bien loin des 20 millions prévus. Malika Seguineau, Directrice générale du PRODISS (syndicat national du spectacle musical et de variété) souligne également le fait « qu’une grande partie du budget repose sur une taxe fiscale variable ». De même Gilles Petit, président du CNV indiquait que le budget du Centre National du Cinéma atteignait plus de 700 millions d’euros en 2017.
Un projet en demi-teinte
Ce projet de Centre National de la Musique, considéré comme indispensable afin de mettre sur un pied d’égalité musique et cinéma, est tout de même critiqué par les professionnels du secteur musical qui craignent d’avoir devant eux une « coquille vide » puisqu’il reste beaucoup de zones d’ombres concernant le financement, le programme et le modèle de gouvernance de ce nouveau centre. Plus récemment, la nomination de Jean-Philippe Thiellay, actuel directeur adjoint de l’Opéra de Paris fait débat : il est jugé peu apte à occuper ce poste car trop éloigné des musiques actuelles et de la variété contrairement à Catherine Ruggeri, inspectrice générale des affaires culturelles et présidente du comité de pilotage du projet, pourtant donnée favorite. Certains dénoncent également le manque de parité dans le secteur musical.
Des défis à relever
Jean-Raymond Hugonet, rapporteur du texte relatif à la proposition de loi tendant à créer un Centre national de la Musique a souligné le fait que le CNM devra rapidement se saisir de lourds dossiers en évoquant notamment : » la défense de la conception européenne des droits d’auteur » et » l’impact sur la diversité culturelle des algorithmes mis en œuvre par les sociétés de streaming « .
Finalement la création du Centre National de la Musique apparaît comme essentiel dans une période ou le streaming, les plateformes de diffusion en ligne et la concentration de morceaux musicaux lors de festival bouleversent la filière musicale qui a dû s’adapter à ces changements. L’objectif du CNM est donc de soutenir les industriels du secteur musical face à la concurrence mondialisée afin de leur permettre de conquérir des marchés. En définitif mieux les accompagner pour asseoir la musique comme arme du soft power national. Finalement, l’avenir du Centre National de la Musique dépend de ce que les 5 établissements qui le constituent décideront d’en faire.
Margaux Lalevée