Une célébration polémique
Nous sommes le vendredi 11 octobre, Cenk Tosun, international turc inscrit le seul et unique but de la rencontre contre l’Albanie et se dirige vers la tribune pour célébrer. C’est à ce moment là que s’immisce sans prévenir la politique dans le sport.
Un salut militaire en direction des supporters turcs, en liesse. Ce geste aurait pu passer inaperçu, puisqu’il a longtemps été l’objet de diverses célébrations de sportifs (comme Karim Benzema, Antoine Griezmann par exemple). Mais au vu du contexte de poudrière au nord de la Syrie où les militaires turcs ont lancé une offensive contre une milice kurde, le geste a entraîné une énorme polémique.
Le lendemain, l’UEFA, régisseur de la compétition pour laquelle s’est déroulé le match, a annoncé ouvrir une enquête sur cette célébration. Car on le rappelle, les lois du jeu, régies par la FIFA, stipulent très clairement l’interdiction de tout acte référant à la politique ou la religion.
Malheureusement, la polémique ne s’arrête pas là. Le soir même, le compte Twitter officiel de la sélection turque poste la photo de la célébration et accompagne l’image de propos de soutien : les joueurs « ont dédié leur victoire à nos valeureux soldats ainsi qu’à nos militaires et concitoyens tombés en martyrs ».
Tous les regards sont alors braqués sur la rencontre opposant la France à la Turquie, lundi 4 octobre. Cette dernière est même menacée d’être annulée, pour cause de tensions exacerbées. Mais elle se déroule, non sans délicatesse… En effet, si la Marseillaise a été respectée, des banderoles avec le message « arrêtez de massacrer les kurdes » ont été déployées dans les travées, avant d’être rapidement retirées par la sécurité.
Et ce que craignait les autorités est arrivé, lorsque que Ayhan égalise pour la Turquie, en toute fin de match, ses coéquipiers se rassemblent vers leurs supporters en tribunes et effectuent de nouveau un salut militaire. Celui-ci n’est pas diffusé sur les antennes d’M6, mais la photo des joueurs turcs fait rapidement le tour des réseaux sociaux.
Un geste jugé comme anti-sportif, et l’UEFA poursuit son enquête pour « provocation politique ». En effet, le règlement punit toute utilisation d’un événement sportif pour une manifestation étrangère au sport (article 11.2.c).
Les sanctions seront de l’ordre d’amendes pour les joueurs et la fédération, et probablement de matchs à huit-clos pour la sélection turque. Un décision sûrement loin des attentes de Roxana Maracineanu, ministre des sports, qui appelait à une sanction exemplaire.
Une nouvelle preuve qui démontre que le sport dépasse parfois, malgré lui, le cadre qui lui est donné pour devenir un support de revendications politiques. On ne peut aujourd’hui nier la puissance de son influence à travers le monde, quand de telles images sont diffusées à autant de spectateurs et téléspectateurs.
Lucas Rivet