[SCI le monde m’était conté] Moris zoli-zoli !

« SCI le monde m’était conté », c’est le nom de code du projet web des étudiants du master Stratégies Culturelles Internationales, actuellement en stage aux quatre coins du monde.
Après un bref passage en Amérique Latine, petit détour par l’Océan Indien : Émeline est actuellement en stage à l’Alliance Française de l’Île Maurice et nous fait partager ses découvertes…

« SCI le monde m’était conté », c’est le nom de code du projet web des étudiants du master Stratégies Culturelles Internationales, actuellement en stage aux quatre coins du monde.
Après un bref passage en Amérique Latine, petit détour par l’Océan Indien : Émeline est actuellement en stage à l’Alliance Française de l’Île Maurice et nous fait partager ses découvertes…

En m’envolant pour l’Île Maurice, je n’avais qu’une vague idée de ce qui m’attendait. Bien sûr, je situais à peu près l’ancienne Isle de France et j’avais un petit aperçu de ses plages paradisiaques mais pour le reste j’ai préféré me laisser porter et découvrir l’Île à la mauricienne.
Quand vous parlez de l’Île Maurice à vos proches, la plupart pense que cette île est encore française. Certes le pays a été colonisé par les français jusqu’en 1810 mais il est indépendant de la Grande Bretagne depuis 1968. Il est vrai que le nom peut porter à confusion. Donc, on se rend bien à l’étranger et je peux vous dire que vous vous sentez vraiment dépaysé et ce dès votre descente de l’avion.
Maurice est une île multiculturelle peuplée uniquement d’émigrés qui ont su créer une nation ouverte sur le monde tout en étant fière des racines de chacun. Ce multiculturalisme s’accompagne d’une représentation des religions inédite dans le monde : toutes les religions, toutes les croyances et tous les cultes sont présents à Maurice et le gouvernement leur accorde une place égale. La majorité des gens sont hindous avec différentes variantes. Le reste de la population se divise entre chrétiens et musulmans. Et bien évidemment un tel multiculturalisme ne pouvait que donner lieu à un métissage extraordinaire tant au niveau de la langue, avec le créole mauricien, que des croyances. Il n’est pas rare de rencontrer des chrétiens qui vont également de temps à autre à la pagode ou au temple.

« S’imprégner des richesses… »

Ce stage à l’Alliance Française de Port-Louis sera donc pour moi l’occasion de m’imprégner de la richesse de la culture mauricienne dans toute sa diversité. L’AF de Maurice est à l’image du pays : multiculturelle. Je travaille dans un environnement de travail très enrichissant. Toutes mes questions, et elles sont vraiment nombreuses (j’ai parfois l’impression de commencer la plupart de mes phrases par « pourquoi… ») à propos des différentes communautés trouvent leur réponse auprès de mes collègues. Mon stage a mis un certain temps avant de commencer réellement : je suis arrivée à Maurice complètement décalquée après quelques péripéties pendant mon voyage et entre les jours fériés et les petits aléas, enfin on va dire que mon acclimatation s’est faite en douceur, bref à la mauricienne. L’AF a peu de moyen à consacrer à la culture. J’ai donc utilisé pas mal de mon temps à faire un travail de veille, enfin ça c’est le joli mot qu’on utilise pour faire bien. Ce travail consistait principalement à pomper les bonnes idées des autres alliances et à voir si elles étaient faisables chez nous. J’apprends également à gérer le site internet de l’AF mis en place l’année dernière par Sarah (que je remercie une nouvelle fois pour son aide), ce qui n’est pas une mince affaire quand on est pas trop douée avec un ordinateur, tout en faisant de la prospection d’artistes dès que je peux comme au Salon de la Famille, salon qui n’a pas grand-chose à voir avec le sujet, mais toutes les occasions sont bonnes à prendre.

« L’enchaînement des festivités… »

J’ai eu la chance d’arriver à un moment de l’année, en février, qui voit défiler trois des fêtes les plus importantes pour trois communautés de l’Île.

« Thaipoosam Cavadee ! »

Pour mon deuxième jour à Maurice j’ai pu découvrir l’une des fêtes hindoues les plus impressionnantes : Thaipoosam Cavadee, fête en l’honneur du dieu Murugan, fils de Shiva et frère de Ganesh célébré par les tamouls. J’avais vaguement entendu parler de cette fête mais je ne m’attendais pas à quelque chose d’aussi impressionnant : il faut vous imaginer des centaines de personnes vêtues en habits traditionnels à dominante rose, couleur du dieu, dans plusieurs processions dans toutes les villes du pays. Suite à un jeune de dix jours, les pénitents se percent la peau à différents endroits, torse, dos, visage et langue tout en portant un kovil (représentation d’un temple) pendant environ cinq heures en marchant pieds nus sur le goudron brûlant en effectuant une boucle qu’ils devront parcourir 108 fois. Au bout de quelques heures en plein cagnard avec des dizaines de trous dans le corps, dix jours de jeune et à mon avis un état de déshydratation plus que sévère, certains pénitents entrent en transe : ils commencent par danser au son de la musique, autour d’eux tout le monde s’arrête, puis rapidement le pénitent se met à hurler comme un perdu. Sur ce arrive une personne, sans doute bien intentionnée, qui amène des tongs à clous (je tiens à préciser que les clous se trouvent sur le dessus de la semelle bien évidemment, dans l’autre sens ça serait moins marrant), puis le pénitent monte sur ces souliers de torture et fait le plus de pas possible. J’aime autant vous dire que ce genre d’exploit n’est pas évident à regarder. La journée s’achève par un repas extraordinaire pour une occidentale comme moi. Vous arrivez chez une personne, en l’occurrence chez Joan ma tutrice à l’Alliance, qui a préparé du riz et sept caris différents pour environ 100 personnes ce qui pour nous est un chiffre énorme mais pour les tamouls c’est un chiffre normal quand on sait que par exemple un mariage rassemble au moins 400 personnes. J’ai vraiment apprécié de me retrouver au milieu de tous ces tamouls qui, c’est vrai pour certains me dévisageaient un peu, les blondes aux yeux bleus étant plutôt rares dans ce genre de fête, mais ils se sont montrés très accueillant et m’ont expliqué toute l’importance de cette fête. Après avoir fait la queue dehors et dès que des places se libèrent nous nous asseyons à l’intérieur et là arrive le défilé : une personne vous amène le riz, une autre un cari, une autre une sauce et ainsi de suite, une dizaine de personnes vous remplissent l’assiette ou plutôt la feuille de bananier (qui est de nos jours remplacée par une feuille en papier vert) et le plus marrant arrive. Bien sûr on a eu la gentillesse de me demander si je voulais une cuillère mais j’ai poliment refusé préférant manger avec la main droite comme tout le monde autour de la table. Étant gauchère je vous laisse imaginer les dégâts ! On aurait dit qu’on venait de me greffer une main et que j’apprenais tout juste à m’en servir, une catastrophe.

« … Puis Maha Shivaratree »

Quinze jours plus tard avait lieu la fête de Maha Shivaratree. Cette fête hindoue qui, cette fois-ci, rassemble toutes les branches de l’hindouisme et commence quelques jours auparavant par un pèlerinage, effectué généralement par les jeunes hindous habillés de blanc portant ou poussant un karwar (représentation d’un temple plus ou moins grand voire géant) jusqu’au lac sacré de Grand Bassin. Pendant les trois jours précédents la fête, les pèlerins défilent par milliers dans les rues ce qui provoque de sacrés embouteillages ! Une fois à Grand Bassin, les dévots font des offrandes au Lac : noix de coco, bananes et mandarines tout en brûlant de l’encens. Ce sont près de 500 000 dévots (sur les 1,3 million d’habitants que compte le pays, ça commence à faire du monde) qui vont se succéder pour prier autours du Lac dans les différents temples en dur ou éphémères. J’avais été particulièrement impressionnée par Cavadee mais cette fête était tout aussi extraordinaire.

« …Et le nouvel an chinois… une fête sans fin !»

A Maurice les fêtes s’enchaînent tout en étant bien différentes. Après Cavadee et Maha Shivaratree, les Chinois de l’Île fêtent le Nouvel An Chinois ou Fête du Printemps ! J’ai été invitée par la Maman d’André, le chauffeur de l’Alliance Française, à dîner la veille du Nouvel An. André m’avait un peu prévenu en m’expliquant ce que nous allions manger. Je me préparais donc psychologiquement à affronter ce repas telle la fameuse épreuve de Koh Lanta durant laquelle les candidats doivent manger des choses toutes plus bizarres les unes que les autres. J’étais surtout un peu anxieuse à l’idée de devoir manger un œuf de cent ans, LE plat spécial Nouvel An. Ceux sont des œufs de cannes qui ont été conservés dans un mélange de boue, de sel, de feuilles de thé et de riz non décortiqué pendant plusieurs semaines voire plusieurs mois, appétissant n’est-ce-pas ? Quand j’ai vu les œufs pourris arriver j’ai été rassurée de ne sentir aucune odeur désagréable ! Eh bien vous me croirez ou non mais c’était plutôt bon. J’ai également eu droit à une petite salade de méduses, délicieuse. Les sino-mauriciens sont cependant de moins en moins nombreux sur l’Île, en raison d’une forte immigration vers l’Australie et le Canada : les traditions se perdent donc peu à peu.
Quand on vit en France, pays où l’on se pose sans cesse des questions sur l’intégration, le communautarisme ou l’identité, s’envoler pour Maurice et découvrir que vivre ensemble avec ses croyances et son mode de vie dans le respect de chacun est possible a quelque chose de rassurant. Même si certaines communautés se sentent lésées voire exclues de la société, comme les rastas, dans l’ensemble on peut observer dans la vie de tous les jours une relative harmonie.
Il y a ici tellement de choses à apprendre, à voir ou à découvrir sur toutes les cultures de l’Île, le dépaysement est total ! Pour une personne curieuse qui pense que le Voyage et l’enrichissement personnel passent par la connaissance de l’autre et de sa culture, l’Île Maurice représente la destination idéale. Et encore je ne vous ai pas parlé des plages de sable fin et de l’eau turquoise… Je ne voudrais pas trop vous faire envie. Moi, je continue de me laisser porter.

Site internet : www.afmaurice.org