Le Maquis du Mont-Mouchet.

Le Maquis du Mont-Mouchet, situé dans le Massif central, fut l’un des principaux foyers de résistance armée en France pendant la Seconde Guerre mondiale. Créé en 1943, il regroupait des réfractaires au STO, des déserteurs et des résistants locaux sous les ordres du colonel Émile Coulaudon (alias Gaspard). Dans un premier temps, les maquisards mènent des actions de sabotage, détruisant des infrastructures ferroviaires et routières pour freiner les déplacements des troupes allemandes. Ils collectent et transmettent également des renseignements aux Alliés et apportent leur aide aux juifs, évadés et réfractaires. En 1944, l’intensification de leurs opérations entraîne une répression violente des forces d’occupation.

Le 10 juin 1944, les Allemands lancent une offensive majeure contre le maquis. Lors de la bataille du Mont-Mouchet (10-12 juin 1944), 2 700 résistants affrontent 4 000 soldats allemands, appuyés par des blindés et l’aviation. Malgré leur bravoure, les maquisards subissent de lourdes pertes et doivent se disperser, mais leur action contribue à ralentir la progression des troupes allemandes vers la Normandie.

Aujourd’hui, le Musée de la Résistance du Mont-Mouchet, les plaques commémoratives et le Monument Mémorial de 1946 rendent hommage aux combattants et perpétuent la mémoire de leur engagement. Le site est devenu un lieu de tourisme mémoriel, attirant de nombreux visiteurs.

I/ Enjeux d’organisation.

Ravitaillement en armes et en munitions :

Les maquisards assuraient leur approvisionnement en armes et munitions grâce aux parachutages alliés, principalement britanniques. Ces opérations nécessitaient une organisation rigoureuse et l’implication de nombreux résistants. Jean Marion fournissait des cartes pour localiser les routes allemandes, tandis que d’autres identifiaient les sites de parachutages. À Marciac, Philippe Maurice Bayle et Antoine Avinin ont joué un rôle clé dans la liaison entre Londres et la Résistance R6, facilitant ces livraisons stratégiques. Dans le Cantal, Jean Lépine, directeur de la Mission Unifiée de Transport, a transformé la région en carrefour logistique pour les parachutages. À Giat, l’Hôtel du Commerce des Villedieu servait

Photographie d’armes et d’équipement  
Source : Photographie prise au musée du Mont-Mouchet.

de refuge et d’entrepôt clandestin d’armes pour les résistants. Cependant, ces opérations étaient périlleuses. Les parachutages se faisaient de nuit pour éviter la détection par l’aviation allemande, mais les conditions météorologiques pouvaient entraîner des annulations ou des décalages. Les Allemands surveillaient activement ces livraisons et interceptaient parfois les cargaisons, menant à des arrestations et à la confiscation du matériel. Les maquisards devaient souvent agir rapidement et prendre des risques pour récupérer les équipements avant l’arrivée de l’ennemi.

Nourriture et soins médicaux :

Photographie du village de Pinols. 
Source : L’Auvergne vue par Papou.

En cas d’urgence, les maquisards se ravitaillaient en nourriture auprès des villageois, mais ces échanges étaient limités pour ne pas épuiser les ressources locales. Des réseaux de résistance externes, notamment depuis les villes voisines, acheminaient aussi des vivres, malgré la surveillance allemande. La nourriture était cachée dans des granges abandonnées, et un rationnement strict était appliqué pour prolonger les réserves. Les paysans des villages voisins, comme ceux de Pinols, et des familles locales fournissaient du pain, des légumes, des œufs et parfois de la viande aux résistants. Les soins médicaux étaient assurés par des infirmiers et médecins présents dans les maquis. En cas de blessures graves, les patients étaient transportés vers des villages comme Pinols ou Clavières, où des médecins liés à la Résistance pouvaient leur prodiguer des soins plus adaptés, malgré les risques de détection par les forces allemandes. Les résistants constituaient des stocks de matériel médical (pansements, désinfectants, bandages) et utilisaient, en cas de pénurie, des remèdes traditionnels d’herboristerie, comme l’arnica pour les inflammations ou l’ail comme antiseptique pour les plaies légères. L’aide des villes voisines et des habitants a joué un rôle crucial pour la survie des maquisards, leur permettant de résister face à l’occupation. Sans ce soutien, ils auraient souffert de famine et d’un manque de soins, entraînant davantage de pertes humaines.

La communication :

Photographie d’un opérateur radio. 
Source : Enseigner la Résistance.

Les communications jouaient un rôle central dans la coordination des opérations. Des opérateurs radios, formés en Angleterre, transmettaient des messages codés à Londres pour demander des parachutages ou signaler des mouvements ennemis. Ces “messages personnels”, diffusés par la BBC, indiquaient des lieux stratégiques pour les parachutages et missions de sabotage. Cependant, des difficultés logistiques pouvaient survenir. Par exemple, en mai 1944, Raymond Troupenat (“Dadaou-Junior”) ne reçoit pas les informations de la BBC concernant un parachutage au Mont-Mouchet. Il doit alors se fier aux directives d’un résistant local, celà illustre bien les défis de la transmission d’informations en temps de guerre.

II/ Interaction avec la population locale.

 Soutien de la population :

Carte avec le Maquis du Mont-Mouchet et comme village voisin Pinols.  
Source : Carte issue d’un article du 11 juin 2014 de France 3.

La population locale a joué un rôle essentiel dans le soutien moral et logistique du maquis, malgré les réquisitions allemandes et les restrictions alimentaires. Les commerçants (bouchers, épiciers, boulangers) et les agriculteurs fournissaient des denrées essentielles, tandis que les armes et équipements arrivaient parfois par parachutages alliés. Par exemple, Jean Zilberman, un jeune Parisien réfugié à Clermont-Ferrand, a reçu un bazooka par parachutage avant de rejoindre le maquis du Mont Mouchet en mars 1944. L’historien Jacques Canaud parle d’un « maquis diffus », illustrant les fortes interactions entre maquisards et habitants. En plus du soutien matériel, la population apportait un soutien moral en encourageant la résistance. Le 14 juillet 1941 à Saillans, 300 personnes se rassemblèrent, chantèrent des hymnes patriotiques et scandèrent des slogans contre Pétain, affirmant ainsi leur opposition à l’occupant. Les habitants pouvaient également héberger des résistants en fuite, notamment des médecins, des curés et des gendarmes complices. Certains gendarmes passaient même des accords avec les maquisards. Par exemple, en 1944 à Die, après une attaque réussie contre un dépôt d’habillement, des gendarmes tirèrent en l’air pour aider les maquisards à s’échapper. En somme, les habitants ont joué un rôle fondamental en fournissant nourriture, armes et renseignements, contribuant ainsi activement à la résistance contre l’occupation allemande.

Répression et représailles :

Rafle de Murat le 24 juin 1944.  
Source : Wikipédia.

Les actions de la résistance ont souvent entraîné des représailles violentes de la part des Allemands, qui cherchaient à affaiblir le maquis en isolant ses membres de leurs points de ravitaillement et en terrorisant la population civile pour la dissuader de toute aide. Ces répressions prenaient différentes formes : rafles, incendies, déportations et massacres. Un exemple marquant est celui de Murat, où, après un affrontement entre maquisards et forces allemandes en mai 1944, les Allemands ont lancé deux rafles les 12 et 24 juin. Des maquisards cachés parmi les civils furent dénoncés, entraînant l’incendie des maisons, la déportation de nombreux habitants vers Hambourg, et un grand nombre de morts. Ce type de représailles a atteint son paroxysme avec les massacres de civils, comme celui de Marsoulas le 10 juin 1944, où les Waffen-SS ont incendié le village et assassiné 28 personnes, dont 11 enfants. Un parallèle peut être établi avec la tragédie d’Oradour-sur-Glane, survenue le même jour, le 10 juin 1944. Dans ce village, les Waffen-SS de la division Das Reich ont massacré 643 civils, hommes, femmes et enfants, avant de brûler entièrement le village. Cet acte barbare, tout comme celui de Marsoulas, visait à semer la terreur, à punir les populations soupçonnées d’aider la résistance, et à dissuader toute future collaboration avec le maquis. Ainsi, ces événements illustrent comment la stratégie de terreur allemande a cherché à briser les réseaux de résistance en s’attaquant aux civils, considérés comme un soutien indispensable au maquis.

III/ Récit sur la bataille du Mont-Mouchet. 

En mai 1944, Émile Coulaudon, dit « Colonel Gaspard », issu du Mouvement Combat de Henry Fresnay et chef de l’A.S. (Armée Secrète) pour la zone R6 (Puy-de-Dôme, Cantal, Allier, Haute-Loire, Lozère), devient Chef Régional des FFI. Le 20 mai, il signe l’ordre N°1 : tous les résistants d’Auvergne doivent rejoindre le maquis sous peine d’être rayés des Forces Françaises de l’Intérieur et de la Libération. Le 25 mai, le Commandant Antoine, Georges Archer, affiche un Ordre de Mobilisation Générale appelant tous les hommes valides à rejoindre le Bataillon Lafayette du 91e RI à La Bastide. Une décision qui embarrasse les généraux de Gaulle et Koenig, d’autant plus qu’un tel bataillon n’existe que sur le papier. Gaspard, après la Libération, assumera cette mobilisation, qu’il admettra avoir précipitée.

Des milliers d’hommes, souvent citadins, mal armés et peu formés, affluent au Mont Mouchet. Certains comportements dérapent : comme ce jeune maquisard abattant un bœuf de labour en s’exclamant « On est des hommes, pas des tantes, on ne mange pas de vaches, nous, on mange du bœuf ». Le ravitaillement devient vite un problème majeur.

Des parachutages livrent 3000 armes individuelles, 150 fusils mitrailleurs, 3500 grenades, mais toujours aucune arme lourde. Les recrues sont souvent inexpérimentées. Plusieurs exécutions internes ont lieu pour faits de brigandage. Le 28 mai, le maquis « Bir Hakeim » est attaqué à La Borie par les Allemands et la Milice. Une trentaine de maquisards y trouvent la mort. Le 29 mai, huit blessés sont fusillés, 27 prisonniers sont torturés puis massacrés, leurs corps mutilés.

Le 2 juin, le Mont Mouchet est attaqué par 800 SS appuyés de blindés légers. Les maquisards, aidés du Corps Franc Laurent et des « Truands », repoussent l’assaut. Mais le 10 juin, c’est une division allemande entière, avec artillerie et aviation, qui s’attaque au maquis. Malgré une défense héroïque, les Allemands prennent le dessus. Le 11 juin, les combats sont féroces : Ruynes est incendié, 27 hommes fusillés, Clavières, Pinols, Paulhac subissent le même sort.

Le 20 juin, encerclés au Massif de la Truyère, les FFI reçoivent l’ordre de décrocher et de se disperser. On comptera plus de 280 morts, 180 blessés et une centaine d’otages civils exécutés. Aucune aide alliée n’arrive malgré les appels répétés. Le Colonel Gaspard assumera seul le désastre, constatant l’absence d’armes lourdes promises et l’inexistence de la « Force C ».

Un pacte de réconciliation sera signé entre FFI, FTP et ORA. On tentera de justifier cette tragédie en affirmant que le maquis avait permis de retenir une division allemande censée aller en Normandie — ce qui, en réalité, n’était pas prévu.

Conclusion :

Photographie du Mont-Mouchet. 
Source : Chemins de mémoire.  

Le Maquis du Mont-Mouchet incarne l’un des épisodes les plus marquants de la résistance française. Grâce à une organisation rigoureuse, une adaptabilité stratégique et le soutien indéfectible de la population locale, les maquisards ont pu tenir tête aux forces allemandes. Malgré des conditions difficiles, ils ont reçu des armes par parachutages alliés, se sont ravitaillés grâce à la solidarité des habitants, et ont maintenu la communication avec les Alliés par des opérateurs radio formés. Sur le plan militaire, le maquis a mené des opérations de guérilla efficaces, harcelant l’occupant, sabotant des infrastructures et défendant le Mont-Mouchet en juin 1944. Cependant, cette résistance acharnée a entraîné de violentes représailles, renforçant encore l’importance du courage et du sacrifice des résistants. Aujourd’hui, le Mont-Mouchet est un haut lieu de mémoire de la Résistance française. Des monuments, musées et plaques commémoratives rappellent les événements tragiques et héroïques qui s’y sont déroulés. Chaque année, des cérémonies y sont organisées pour honorer la mémoire des maquisards tombés pour la liberté, soulignant leur rôle dans la désorganisation des forces allemandes et leur contribution à la libération de la France. Ce lieu demeure un symbole fort du combat pour l’indépendance et un hommage à ceux qui ont résisté, au péril de leur vie.

Etudiant.e.s. : Boissier Clément, Lermusiaux Naïs, Levy Benoît, Mogno Adrien, Riesenmey Léa.