Le complexe protohistorique héroïque des Touriès

Mise en contexte

Le complexe protohistorique à stèles des Touriès est situé en Aveyron sur la commune de Saint-Jean et Saint-Paul. Il est découvert dans les années 1990 dans un champ lors du défonçage d’une haie.

Ce genre de sanctuaire celte est assez unique en Gaule méridionale mais les stèles sont fréquentes dans les sanctuaires celtes du premier Âge du fer, qui visent à rendre hommage aux héros tombés au combat, et on en retrouve dans des lieux ayant pour fonction le culte ou dans des cimetières un peu partout en Europe dans les territoires qui furent occupés par les Celtes.Ce site est situé dans la région géographique appelée Gaule Méridionale. Le terme Gaule Méridionale fait référence à la région géographique qui se trouve au sud de la Loire. Cette région correspond à une grande partie du territoire actuel de la France, y compris le Massif central, le Sud-Ouest de la France et une partie de la côte méditerranéenne.

Le premier Âge du Fer quant à lui, est la période temporelle durant laquelle ce site a été le plus utilisé et d’où datent les stèles retrouvées. Le premier Âge du fer, également appelé « Hallstatt », les Celtes de France actuelle descendraient du berceau d’Hallstatt, berceau situé dans le centre de l’Europe, en Autriche. Ils auraient donc ensuite migré dans le rayonnement du noyau primaire. L’Âge du Fer est appelé ainsi en référence à la culture matérielle de l’époque, il s’étend approximativement du 8ème siècle avant notre ère jusqu’au 5ème siècle avant notre ère. Cette période est caractérisée par l’émergence de la métallurgie du fer, qui a remplacé progressivement la métallurgie du bronze.

Le lieu a été occupé durant de nombreux siècles, et s’ancre parfaitement dans l’Âge du Fer européen. Après cette période le lieu sera abandonné et ne sera plus utilisé ce qui en fait son caractère unique dans cette partie de l’Europe.

La civilisation Celte

Les Celtes avaient développé une religion polythéiste, qui a disparu à la suite de la christianisation romaine. Les dieux étaient souvent représentés par des figurines. Les dieux principaux ont été retrouvés et nommés, on peut citer Teutates (dieu de la guerre), Taranis (dieu du tonnerre), Esus (dieu de la terre), Cernunnos (dieu des enfers), Épona (déesse protectrice des chevaux et des cavaliers) ou encore Lugus (dieu de la guerre, des arts et de la médecine).

Les Celtes avaient une façon particulière de voir la mort et de rendre hommage à leurs défunts. Ils utilisaient des tombes, des sanctuaires et des sites funéraires. Les sanctuaires étaient très riches en armes et en corps. On peut retrouver aussi des sépultures de chars, où des chars d’apparat étaient enterrés avec le défunt afin de l’aider dans son voyage spirituel. Au 8ème siècle, en Italie centrale, un rite funéraire exceptionnel se développe, il servira par la suite de modèle pour la civilisation Celte. Ils ont élaboré des sépultures individuelles pour les personnages de haut rang, comportant de nombreux objets exceptionnels ainsi que des monuments imposants. Tous ces rites ont pour but d’honorer les défunts qu’ils considéraient comme supérieurs et importants, l’élite sociale.

Le sanctuaire héroïque à stèles des Touriès

La campagne 2008 sur le site avait pour objectif de comprendre le contexte archéologique des stèles qui avaient été découvertes les années précédentes sur le site, sachant qu’il était presque sûr que ces dernières étaient un réemploi dans un rempart d’un oppidum celte, comme c’était le cas de la grande majorité des stèles retrouvées dans le Midi de la France (plus de 500).

Cependant les premiers résultats ont montré que ce n’était pas le cas et que le site était bien unique en Gaule méridionale, les stèles érigées n’étaient pas un réemploi mais bien le résultat de manipulation dans un cadre de culte et/ou funéraires. Cette découverte est la déduction des fouilles qui ont été menées sur le site.

On retrouve donc sur chantier une multitude de stèles érigées, mais aussi de grandes quantités de céramiques, provenant d’amphores et de contenants principalement, dont l’argile est de la région, mais aussi de bien plus loin, comme d’Espagne ou d’Italie, ce qui nous montre bien les échanges entre populations à cette époque.

Ces stèles sont en grès, que l’on ne trouve pas dans la région. En effet ce dernier provient d’Italie d’après les analyses menées sur les stèles, ce qui implique que ces énormes rochers de grès de plusieurs centaines de kilogrammes ont réussi à être transportés sur cet éperon rocheux à des centaines de mètres de hauteur : un exploit pour l’époque.

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On retrouve aussi un monument assez curieux, c’est un podium en pierre assez imposant. Il est bordé par une palissade et réemploie de nombreux fragments de stèles en grès. Il ne ressemble pas du tout aux tumulus, une éminence artificielle en terre ou en pierre qui recouvre une sépulture, que l’on retrouve sur le Causse dans la région et ce podium n’a livré aucun ossement humain, ce qui signifie qu’il n’a pas été utilisé dans un but funéraire, comme la majorité des sites similaires dans la région.

Ces découvertes et les hypothèses faites ne restent que des hypothèses, étant donné qu’il n’existe aucune trace et sources écrites datant de l’Âge du Fer par rapport à l’utilisation de ce site, la tradition celte étant orale et le savoir se transmettant par les druides qui détenaient le savoir oral à cette époque.

Bibliographie :

1. BARRAL (Ph.) et THIVET (M.), Sanctuaires de l’âge du Fer. Actes du XXXXIe colloque international de l’Association Française pour l’Étude de l’Age du Fer (Dole, 25-27 mai 2017), 2019
2. GRUAT (Ph.), PIERRE (A.), Guerriers celtes du Midi, Stèles et sculptures du Premier âge du Fer, catalogue d’exposition du Musée Fenaille, Rodez, 2016
3. GARCIA (D.), GRUAT (Ph.), Stèles et statues du début de l’âge du Fer dans le Midi de la France (VIIIème – Ivème siècle avant JC) : chronologies, fonctions et comparaisons, Actes du colloque de Rodez, 2009. DocA Mérid 34, 2011
4. GRUAT (Ph.) avec la collaboration de AGOGUÉ (O.) et GARCIA (D.), Stèles et statues des Celtes du Midi de la France (VIIIe – Ive siècle avant JC). Plaquettes des pré-actes de la table ronde internationale (Rodez du 24 au 25 avril 2009). Rodez, éd. Du Musée du Rouergue (Conseil général de l’Aveyron), 2009
5. GRUAT (Ph.) (dir.), CURE (L.), MARCHAND (G.), TRESCARTES (J.), Campagne 2008 sur l’éperon protohistorique à stèles des Touriès, Cahiers d’archéologie aveyronnaise, 2009
6. GRUAT (Ph.) et al, Le complexe protohistorique à stèles des Touriès à Saint-Jean et Saint-Paul (Aveyron), fouille programmée triennale (2009-2011), Rapport Final 2011.

Étudiants : Manon BERNEL (L1) et Simon BABY (L2)