Villefranche de Rouergue, de la fondation à la construction de la collégiale. (2019-2020)

Villefranche de Rouergue, de la fondation à la construction de la collégiale , 1252 à 1519

File:Map France 1180-fr.svg
Auteur anonyme, Carte de la France en 1180, 3 décembre 2008.

Villefranche est une ville fondée peu de temps après la croisade des Albigeois.  A la suite de celle-ci le comte de Toulouse Raymond VI perd ses terres et les reconquiert avec son fils, Raymond VII sans le soutien de la monarchie française. En 1222, Raymond VI meurt.  Son fils, Raymond VII hérite de son excommunication.  En janvier 1224,  il a récupéré toutes ses terres et défait Amaury de Montfort. Ensuite, une croisade est lancée contre lui, dont le roi de France prend la tête suite à le donation symbolique d’Amaury de Monfort de ses possessions. Le roi, Louis VIII vainc et récupère le comté de Trencavel, Avignon et le Toulousain. Cependant, il meurt au retour de ses conquêtes.

Auteur non-identifié, Le comte de Toulouse Raymond VII se soumettant au roi de France Louis IX, 1296

Cette période se termine en 1229 où Raymond VII cède Avignon et le vicomté de Trencavel à la couronne et la main de sa fille Jeanne à Alphonse de Poitiers, frère du roi, Louis IX, lors des accords de Paris. Lorsqu’il meurt en 1249, le Toulousain revient à Alphonse de Poitiers. Les habitants de Najac, préfecture du Rouergue s’insurgent. Ce climat encourage Alphonse de Poitiers a créer une ville dans la région pour s’assurer des soutiens locaux. Nous pouvons donc nous demander en quoi la fondation et le développement de Villefranche de Rouergue de 1252 à 1519 répondent à une volonté de contrôle de la région et de la population par l’administration royale ?

 

I) La fondation

Il faut tout d’abord savoir que les villes nouvelles comme  Villefranche sont nombreuses et s’ancrent dans un contexte national. En effet, depuis le XI° siècle, la France connaît une croissance démographique continue. Cette nouvelle main d’œuvre peut donc s’installer sur de nouvelles terres, pas encore défrichées. La création de la ville permet de cultiver des terres délaissés auparavant. La royauté et les comtes vont donc créer des villes nouvelles en France. Le phénomène est très fréquent dans le comté de Toulouse où les comtes puis le roi vont encourager la création de villes nouvelles.

 

Bernard Gilles, Plan de Villefranche de Rouergue vers 1650, 1983

Qu’est-ce qu’une ville nouvelle? C’est une ville qui est construite ex nihilo (à partir de rien). L’administration décide de fonder une ville à un endroit précis et essaye d’attirer le plus de population possible. Pour cela plusieurs moyens peuvent être utilisés. Dans le cadre de Villefranche de Rouergue, on l’exempte d’une partie de ses impôts. Ainsi, l’administration royale espère attirer une population qui lui est reconnaissante et fidèle.

 

Enfin, Villefranche de Rouergue, comme la plupart des villes nouvelles, est fondée à partir d’un plan défini: la Bastide. Les multiples avantages d’une ville construite sur le plan d’une bastide permettent d’attirer plus de population.

II) Son développement

Villefranche de Rouergue se développe économiquement autour de trois axes: L’Aveyron (rivière qui passe à côté de la ville), les mines situées de l’autre côté de l’Aveyron et le marché qui devient le plus dynamique du Rouergue. L’Aveyron est une source d’énergie qui va grandement aider la ville à se développer. Elle permet la construction de martinet à battre le cuivre, de papeteries, de moulins à farine et de tanneries. Les mines de l’autre côté de l’Aveyron permettent une activité d’extraction des minerais. On y retrouve plusieurs minerais depuis l’Antiquité tels que l’argent. Le roi y créer un atelier monétaire royal. Le marché est la clef  de voûte de l’économie. Une multitude de facteurs explique son importance. Des lopins de terres sont vendus avec les propriétés en ville et le lieu le plus proche pour écouler la production est le marché. Les exemptions de tailles permettent aussi de rendre l’achat de ces terres très attractif.  Le pont des Consuls construit au début du XIV est aussi l’un des rare point de passage de l’Aveyron faisant de Villefranche de Rouergue une ville à la croisée des chemins.

Christophe Finot, Villefranche-de Rouergue – Eglise-Notre-Dame, Villefranche de Rouergue, Juillet 2007

Pour l’aspect religieux, le développement est très rapide. Dès 1276, c’est-à-dire trente ans après la fondation, on assiste à l’établissement de couvents (Cordeliers [1279], Clarisses [1330]). Puis les lieux religieux vont se multiplier partout dans la ville. Ce sont des lieux où s’installent en premier temps des Franciscains, ce qui n’est pas anodin. Deux grands leaders franciscains (plus précisément fratricelles) permettent leur développement dans la région : Pierre-Jean Olieu   Avec le développement religieux s’opère le développement politique. A la fondation peu de formes de pouvoirs citadins sont visibles. Les plus importants sont les consuls (cossols).  Les consuls devaient définir le montant de la taille (qui parvenait à la ville et non au roi) et son rôle. Ainsi, ils avancent et prélèvent l’impôts.  Cependant, le rôle politique de la ville va évoluer lorsqu’en 1369, le roi de France déplace de Najac vers Villefranche son administration. Le sénéchal, le juge-mage et le trésorier du Rouergue s’installe à Villefranche. À partir de ce moment, Villefranche a réellement une grande influence sur la politique locale. Quant à Najac, elle n’a plus la même importance qu’à la période de la fondation de Villefranche. Cependant, loin de se trouver sans concurrente, elle va maintenant “s’opposer” à Rodez, centre de l’administration comtale alors que Villefranche représente l’autorité royale.

Pour comprendre à quel point son développement propulse Villefranche en ville importante du Rouergue, deux exemples architecturaux sont frappants. Les murailles en sont le premier. Elles apparaissent dès 1342 à l’approche de la guerre de cent ans. En comparaison, Rodez ne peut s’en équiper qu’en 1350. Les fortifications sont censées permettre de tenir la ville (qui n’est jamais assiégée durant la Guerre de Cent Ans).

Photo mise en ligne par la commune de Villefranche de Rouergue, Le Pont des Consuls

Le pont est le second exemple. Construit par les consuls au début du XIV° siècle, c’est véritablement l’un des aménagements les plus importants de la ville. Il est doté de fortifications pour éviter que ne soit prise la ville. C’est une construction très importante notamment pour des raisons citées précédemment.

 

III) Son succès

Tout d’abord, c’est une ville au centre de la vie rurale. La bastide est un moyen très efficace pour regrouper les populations rurales éparpillées dans les campagnes. La ville étant construite à partir de rien, elle est mieux agencée et crée de nouveaux emplois ce qui attire des travailleurs. La place centrale est réservée au commerce et permet l’organisation de grands marchés et de foires. La ville est aussi un relais de l’autorité royale pour la population qui vit en ville ou seulement présente aux marchés.

Qui plus est, la concentration de la population et la venue régulière des habitants alentour permet une levée plus fluide et plus rapide des taxes et de certains impôts.

© D. Viet – Tourisme Occitanie, Place centrale de la ville et son marché

Il s’agit donc d’un territoire très rural, mais bien intégré (pour l’époque) grâce à des infrastructures comme des ponts et des routes à l’image du pont des consuls.

Chroniques de Froissard, La capture du roi Jean II le Bon, XVème siècle

Cependant, nous pouvons relativiser le contrôle de la population par l’autorité royale. Lors de la Guerre de Cent Ans, le roi Jean II est fait prisonnier par les anglais à la suite de la bataille de Poitiers. Pour obtenir sa libération le traité de Brétigny-Calais (1360) est conclu. Le roi d’Angleterre, Edouard III obtient la souveraineté sur environ un tiers de la France, sur les territoires autour de la Guyenne, dont le Rouergue et de ce fait Villefranche.

 C’est Louis XI qui fait de Villefranche un comté englobant la région jusqu’au Lot. Il le donne à Frédéric d’Aragon, prince de Tarente pour son mariage avec Anne de Savoie, sa nièce. Enfin, en 1551, un présidial, dépendant du parlement de Toulouse est créé. La ville devient donc la capitale judiciaire du Rouergue au détriment de Rodez et Millau.

Conclusion

Villefranche de Rouergue a été fondé dans le but de faire plier Najac, capitale administrative du Rouergue à cette époque. Seulement l’idée a si bien marché que Najac a perdu son importance dès le milieu du XIVème siècle. Villefranche a réussie à se créer une place dans l’administration locale du Rouergue en un siècle. Pour cela, cette-dernière dispose d’avantages surtout au niveau économique. De nombreuses infrastructures et bâtiments voient le jour (pour des raisons religieuse, économique ou politique). C’est ainsi que Villefranche devint capitale royale du Rouergue, mais aussi que naît véritablement la rivalité avec Rodez. Enfin, notons que Villefranche est une ville nouvelle qui a réussie à s’ancrer dans le temps, jusqu’à aujourd’hui. Il est d’ailleurs intéressant de voir les bâtiments que nous avons détaillé dans ces quelques lignes en se baladant dans les rues de cette bastide vieille de sept siècles.

Bibliographie

Travail de César Leduc (L2), Léo Marquier (L2), Caroline Couderc (L1), Fanny Sanchez (L1).