La compagnie des Houillères de Carmaux du temps des Solages (1780 à 1944).

La compagnie des houillères de Carmaux sous la famille de Solages

VIDEO – BENJAMIN TERNISIEN

Carmaux un village rural jusqu’à l’arrivé de la famille Solages 

Le XVIIIe siècle voit les débuts de la Révolution industrielle. Ce phénomène qui touche en premier lieu l’Angleterre, puis l’ensemble de l’Europe, est dû à l’invention de nouvelles machines, qui vont révolutionner le processus productif. Cette révolution va transformer l’espace et les sociétés, en les faisant passer d’un monde dominé par l’agriculture à un monde. Dans ces transformations, le rôle de certaines familles a été déterminant. Cependant, ces machines qui permettent cette transition, ont un point en commun, elles demandent de l’énergie, notamment celle fournie par le charbon. On assiste alors, partout, au développement de la production des houillères, qui vont nécessiter l’emploi de mineurs, qui se rassemblent autour des mines, jusqu’à former de véritables villes minières. C’est le cas à Carmaux où la famille de Solages a joué un rôle crucial.

Chevalier Gabriel de Solages. Musée-Centre d’art du verre de Carmaux. Auteur inconnu.

L’exploitation du charbon n’est pas récente. Elle remonte au Moyen Âge, quand au XIIIe siècle, des paysans logeant à proximité du Cérou, en découvrent la présence. Ce charbon. Il est utilisé pour chauffer les maisons et l’excédent est apporté à Albi, où il est vendu. Cette exploitation ne s’effectue pas dans des galeries, mais dans des tranchées, atteignant généralement une vingtaine de mètres de profondeur. Cette première exploitation est artisanale et personnelle.

Elle sera poursuivie à partir de 1752 par la famille de Solages, jusqu’à la création d’une véritable ville charbonnière de Carmaux. Gabriel de Solages créé alors, “la compagnie de Carmaux”, dont il était actionnaire majoritaire, pour éviter la la dérogeance.

La société emploie alors une centaine de salariés capables d’extraire environ 10 milliers de tonnes par an. Le charbon de terre remplace, peu à peu, le charbon de bois, pour la cuisson de l’argile, pour la fabrication de matériaux de construction comme la brique. En 1782, l’extraction du charbon est rendue plus complexe par le creusement de puits plus profonds, pouvant atteindre des profondeurs de 120 mètres. A cette profondeur la houille de Carmaux est d’une qualité supérieure aux meilleurs charbons d’Angleterre. La demande d’Albi constitue le débouché le plus important des mines de Carmaux. Le transport est assuré par de lourdes charrettes, tractées par des chevaux, qui relient Carmaux à Albi. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, Gabriel-Charles de Solages contribue à la modernisation des techniques d’extraction du charbon dans le carmausin. Même si les mineurs ne disposent encore que d’un outillage rudimentaire. Ainsi on utilise encore le pic d’extraction, la masse, la pioche, ainsi que des traîneaux pour le transport interne servent à l’extraction du charbon creusé a même la veine. L’éclairage est assuré par une bougie, portée sur le casque. Cependant, on utilise aussi des machines comme des pompes aspirantes, mises en mouvement par un manège à chevaux.

L’implication de la famille de Solages durant la révolution industrielle et le début de la transformation de Carmaux

L’invention de la machine à vapeur est déterminante dans tous les domaines. Les premières machines à vapeur sont conçues afin de pomper l’eau des mines, et permettre la poursuite de leur exploitation. Et c’est le charbon qui permet de les faire fonctionner.

Ailleurs aussi, il est apprécié car c’est un excellent combustible, qui dure plus longtemps que le bois. Pour répondre à la demande des hauts fourneaux industriels, le bassin du Carmausin, bien que modeste à l’époque, augmente sa production et ses effectifs. On assiste alors à une monté de l’industrie charbonnière dans les houillères de Carmaux. Le nombre de mineurs double, passant de 1000 en 1860, à 2000 en 1880 et la production annuelle passe de 120 000 tonnes en 1860, à 320 000 en 1880.

Mais durant toute cette première moitié du XIXe siècle, Carmaux accumule un retard considérable en matière d’avancées techniques et de conditions de travail, sur les mines du Nord de la France. L‘enclavement de la région et la faible mécanisation nu

Photo de Jean Jaurès par Navar (1904).

isent au développement du bassin. La compagnie doit améliorer ses techniques d’extractions et ses moyens de transports pour rester compétitive sur le marché. A partir de 1900, les progrès techniques marchent de pair avec l’amélioration de l’organisation du travail. De nouvelles infrastructures se construisent au sein du village, qui se transforme peu à peu, en ville industrielle.

Avec l’augmentation progressive du nombre de mineurs. Au XIXe siècle, la ville de Carmaux ne possède pas d’hôpital. C’est la société des mines qui fait construire dès 1883, un établissement destiné à accueillir les mineurs accidentés. Il prend le nom de Sainte Barbe, qui est la sainte patronne des mineurs. Au fil des années, cette ancienne clinique, située en centre-ville, ouvre ses portes à l’ensemble de la population.

Le 19e S marque également Carmaux par son combat pour le socialisme, à l’échelle nationale avec la grande grève de 1892

Les guerres mondiales qui transformes Carmaux en ville industrielle majeure

En 1914, la production et les profits augmentent. La guerre provoque l’occupation des mines du nord, la migration des réfugiés mineurs sur Carmaux et une demande d’effort de production, pour compenser les gisements du nord pris par les Allemand. L’extraction atteint des taux records :

– En 1910 : 610 milliers de tonnes sont produit avec 3 300 mineurs

– En 1918 : la production atteint 850 milliers de tonnes avec 5 500 mineurs.

Affiche « Ordre de mobilisation générale » datée du 2 août 1914, conservée aux Archives nationales.

C’est l’apogée de la production houillère pour le bassin carmausin. Apogée qui précède un rapide déclin. À la fin de la guerre, la production carmausine chute, par manque de main-d’œuvre. Les réfugiés sont repartis chez eux et les mineurs carmausin ne sont pas encore revenus du front, du moins pour les rescapés.

Jérôme de Solages, fait alors appel aux mineurs de Pologne, d’Italie et d’Espagne. En 1930, les mineurs d’origine étrangère représentent la moitié des effectifs du fond de la mine. Pour les attirer, la société des mines de Carmaux prend des mesures considérables, pour améliorer le cadre de vie des mineurs ainsi que leurs conditions de travail, c’est le paternalisme.

Dans les années 1940 avec la Seconde Guerre mondiale, un retour des mineurs du nord, (belges, alsaciens, lorrains) est observé aux mines de Carmaux, pour extraire le charbon français, en zone libre. Mais, la main d’œuvre est difficile à trouver, de part l’engagement dans la résistance et les restrictions alimentaires qui créent de l’absentéisme. En 1944, la société est réquisitionnée. Cette réquisition va durer 22 mois. Cela marque la fin de la famille de Solages, à la tête de l’exploitation des mines de Carmaux, qui est devenue une véritable ville industrielle. Enfin en 1946 l’ensemble des mines de charbon de la France sont nationalisées.