La Cathédrale Sainte-Cécile d’Albi et son impact sur l’imaginaire collectif

La cathédrale à la tombée de la nuit,
Mairie Albi

“Albi, La cité de porphyre, d’une couleur orientale et ses monuments qui s’empourprent au soir, à l’heure ou la puissante cathédrale fait amitié avec le soleil couchant”. 

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Cette magnifique citation de l’écrivain et homme politique Jean Jaurès illustre parfaitement la place centrale de la cathédrale dans la ville d’Albi. 

En effet, La cathédrale Sainte-Cécile d’Albi est non seulement la plus grande cathédrale de brique du monde mais aussi une construction monumentale dans le paysage albigeois. 

Résumé historique : 

Décidée en 1277 par Bernard de Castanet, elle a permis de faire d’Albi une ville de premier plan. Considéré comme un inquisiteur, il a été évêque d’Albi de 1276 jusqu’à ce qu’il soit destitué en 1308 par le pape Clément V suite à des suspicions d’homicides par empoisonnement. Le style architectural de la cathédrale se démarque de ce qui se fait à l’époque et témoigne de la volonté de l’évêque d’affirmer sa puissance et son indépendance vis-à-vis des bourgeois, des hérétiques et du Roi. La présence de la cathédrale crée une dynamique autour de la place Sainte-Cécile et en fait un pôle d’échange entre monde urbain et rural. Le chantier avance rapidement et en un siècle, le plus gros est édifié et c’est en 1480 qu’elle est consacrée. Depuis, en guise de cadeau, ou à la suite de simples initiatives des différents évêques, des peintures sont ajoutées, et aujourd’hui ces 18 500 m² de fresques et décorations en font la plus grande cathédrale peinte en Europe. Elle abrite aussi l’un “ des plus grands orgues d’Europe. Donc, on estime aujourd’hui qu’elle est constituée de 25 000 briques.

Aussi, la brique, matériau moins cher que la pierre, permet une construction rapide et ancre une profonde signification puisque dans le catharisme, considéré comme de l’hérésie par les catholiques, le Christ n’était pas doté d’un corps mais seulement d’un esprit, donc ce rouge clair rappelle la couleur de la chair. La cathédrale devait également servir de moyen de dissuasion contre les cathares en démontrant la force et la richesse de l’Église. La construction massive et imposante était destinée à inspirer le respect.

La cathédrale Sainte-Cécile a aussi été conçue pour pouvoir être utilisée comme un lieu de refuge en cas d’attaque. Ses murs massifs et ses fortifications pouvaient servir de rempart. Son architecture a été façonné pour montrer un signe d’opposition aux cathares : Les vitraux et les sculptures de la cathédrale Sainte-Cécile transmettent des messages religieux orthodoxes en opposition aux croyances cathares. La Cathédrale Sainte-Cécile est une forteresse de la foi catholique et un joyau de la culture et du savoir-faire languedociens.

L’objectif de ce bâtiment imposant était donc de montrer la puissance de la religion catholique pour définitivement affirmer la suprématie catholique dans la région et cloître le chapitre des dissidences religieuses. Les éléments gothiques traditionnels, tels que les voûtes élevées, les arcs-boutants et les gargouilles, étaient utilisés pour affirmer la grandeur de l’Église catholique.

Dans l’architecture extérieure, on retrouve des murs de forteresse, le clocher mais aussi les voûtes qui représentent bien l’aspect d’une cathédrale gothique.

La vie quotidienne autour de la Cathédrale :

Siège épiscopal, Albi est partagée entre le pouvoir de l’évêque et celui des vicomtes qui rendent hommage au comte de Toulouse. Dans cette France féodale du XIIIème siècle, les vassaux s’émancipent de l’autorité royale. Albi devient alors, comme presque toutes les villes du Midi, une communauté quasi indépendante. 

En effet, le Languedoc est principalement régie par deux maisons : celle des Trencavel, et celle de Toulouse, toutes deux vassales du Roi de France. Durant la croisade albigeoise, leur rivalité n’a pu être mise de côté ; le comte Raymond VI de Toulouse se lance dans la croisade, tandis que Raimond-Roger de Trencavel se prépare à la stopper. Le conflit n’est soutenu que mollement par la maison de Toulouse, et le Pape s’en rend compte. C’est pourquoi en 1233, il institua l’Inquisition, chargée de combattre l’hérésie. De plus, les albigeois n’hésitent pas à dénoncer leurs voisins, ou amis, soupçonnés d’hérésie, contre une récompense. 

Fatigués par ces changements constants, par l’insécurité, et les combats causant beaucoup de pertes, les albigeois, ainsi que la plupart des languedociens, montrent leur mécontentement. La révolte gronde, et augmente les tensions entre les deux maisons. Celles-ci se disputent l’hégémonie de la région. Pour annihiler tout risque de désordre, le comté de Toulouse et le vicomte d’Albi sont remplacés par trois sénéchaussées de Toulouse, permettant au Roi de France de racheter la région. 

La place de la cathédrale qui se développe particulièrement durant le XIVe siècle est importante. L’abondance de mention de la place dans archives municipales illustre son rôle essentiel. Lieu de rassemblement social, elle permet aux Albigeois d’échanger. Quelque part, c’est ici que l’opinion publique se forge.

La cathédrale a eu un impact économique puisqu’elle représente un lieu de rassemblement pour des évènements tels que le marché ou encore la foire. Tout ceci contribue au dynamisme de l’ économie. 

De plus, la Cathédrale étant un lieu de pèlerinage, nombre de fidèles s’y rejoignent et participent au rayonnement de l’évêché d’Albi. De plus, ces pèlerins contribuent à l’économie locale en dépensant de l’argent dans de la nourriture ou pour se loger.

La construction de la Cathédrale a amélioré la vie des habitants puisque le développement de certains métiers comme l’artisanat ou les commerçants a enrichit la ville. Quant au tourisme , c’est par l’art religieux que la création d’œuvres ou encore de sculptures qu’Albi peut profiter d’une grande renommée.

     L’Église catholique est omnipotente tout au long du Moyen-Age. La vie des hommes et des femmes est en effet marquée par les sept sacrements que sont le baptême, la première communion, la confirmation, la confession, l’eucharistie, le mariage et l’extrême-onction. Chaque enfant est baptisé, et donc converti au catholicisme, pour lui assurer une place au paradis. Les dogmes sont importants : l’école est entièrement dirigée par les clercs, et les élèves y puisent un certain réconfort. En effet, l’Eglise leur promet une éternité de joie et de merveilles au Paradis. Les albigeois gardent donc espoir dans cette promesse de grandeur post mortem. Ils se réfugient dans leur foi pour oublier le malheur de leur vie quotidienne. 

Désespérés, les paysans voient, en la construction de la cathédrale Sainte Cécile, un salut, destiné à les aider en ces temps incertains. A partir de la seconde moitié du XII° siècle, et une fois le catharisme éradiqué de la région, leur vie est donc marquée par les cloches de sa cathédrale : ils se lèvent, vont au travail, mangent, et se couchent à leurs sons. 

Albi, cité épiscopale, est tout au long du Moyen Âge une ville fortifiée entourée de murailles.

L’architecture intérieure :

Si l’extérieur très austère de la cathédrale est une volonté assumée, le contraste avec l’éclat des décorations intérieures l’est tout autant. La Cathédrale accueille La fresque du jugement dernier, mêlant sublime et divin, et comporte de riches décors des voûtes. L’œuvre peinte du Jugement Dernier est celle que l’on voit le plus en entrant dans la cathédrale. Réalisée à la fin du XVe siècle sous l’évêché de louis d’Amboise, cette œuvre représente le jugement dernier comme raconté dans la bible dans l’apocalypse de Jean. Popularisées au XVe siècle, les représentations du jugement dernier s’insèrent dans une ère de traumatismes et d’angoisses sotériologiques face à la mort. A Albi, les épisodes de peste et de famine liée à des crises frumentaires reviennent sporadiquement depuis la grande peste de 1348 et sont très mortifères. Les maladies, souvent foudroyantes, oblitèrent le culte rendu aux mourants, notamment celui de l’extrême-onction. Le jugement dernier est conçu pour renforcer la foi et l’institution ecclésiastique. 

La Fresque du Jugement dernier, Wikipédia

Il y’a un contraste assez fort entre le Jugement dernier et les voûtes. A l’angoisse on fait succéder l’espoir.

Les voûtes figurent le Ciel, L’Eglise triomphante. On voit à l’abside, la session glorieuse du Christ à la fin des temps. Autour de lui se trouvent les symboles des évangélistes, la Vierge, et les apôtres. Pour évoquer subtilement le corps mystique de l’Eglise, les peintres ont utilisé des couleurs simples telles que l’or et l’azur. Ils ont écarté une représentation naturaliste du Paradis. Les végétations qui s’incorporent dans toutes les décorations sont plus abstraites que réelles. La répétition des motifs et des couleurs dominantes traduisent l’infini céleste. 

Photographie des voûtes dans la cathédrale d’Albi.

Finalement, la Cathédrale d’Albi reste un monument architectural et d’histoire d’exception qui accueille des millions de visiteurs chaque année au sein de la cité épiscopale d’Albi, cette dernière étant classée au patrimoine mondial de l’UNESCO.