Déportation et internement en Occitanie pendant la Seconde guerre mondiale.

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Le 24 octobre 1940, quatre mois après l’armistice, le maréchal Pétain rencontre Adolf Hitler en zone occupée, à Montoire-sur-le-Loir . Au centre, le colonel Schmidt, qui leur sert d’interprète. Cette poignée de main est emblématique de la collaboration du régime de Vichy avec l’Allemagne nazie.

Les troupes allemandes envahissent la Pologne le 1er septembre 1939, déclenchant ce qui deviendra ensuite la Seconde Guerre mondiale. Le 6 octobre, la Pologne capitule et les premiers massacres et répressions commencent, entraînant de grandes vagues d’immigration vers d’autres pays tels que le France. C’est ainsi que les premiers camps, alors camps de réfugiés sont mis en place. En mai 1940 débute l’offensive allemande contre la France. Le 22 juin 1940, le maréchal Pétain demande l’armistice et la France, séparée en deux zones, l’une occupée, l’autre « libre », entre alors en collaboration avec l’Allemagne.

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Panneau interdisant l’accès de certains lieux aux juifs. Yad Vashem.

A partir d’octobre 1940, Pétain promulgue un décret de loi, le « premier statut des Juifs » qui définit une « race juive ». Les Juifs sont ainsi exclus de la société. A cette période sont aménagés des camps d’internement pour les Juifs étrangers. En janvier 1942, la « solution finale » est mise en place par Hitler lors de la Conférence de Wannsee où est organisée l’extermination des Juifs d’Europe. A partir de 1942 les Juifs sont donc envoyés dans des camps de concentration et de mise à mort. L’Occitanie est une région qui se situe en zone libre et qui suit donc les réglementations qui concernent cette zone. Comment se déroulent l’internement et la déportation en Occitanie pendant la Seconde Guerre mondiale? Dans une première partie nous nous intéresserons à la mise en place du phénomène d’internement en Occitanie puis à son application et enfin nous aborderons la question de la déportation des internés.

I- Arrestation et emprisonnement

1) Statut et utilisation de la zone libre par Vichy

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La France coupée en plusieurs parties en 1940 : zone libre, zone d’occupation italienne, zone occupée, avec à l’intérieur de celle-ci : la zone annexée Alsace-Moselle, la zone placée sous l’administration militaire allemande de Bruxelles (nord de la France), et deux territoires classés zone interdite. Wikipédia


Fin 1940 et début 1941 deux types de populations juives se trouvent concentrés dans la zone libre dite zone non occupée, à l’issue de l’armistice. D’autre part, il y avait les Juifs français échappés de la zone occupée. Bien que recensés et surveillés, ils étaient libres de leurs mouvements et ne portaient pas l’étoile jaune, à l’inverse de la zone occupée. En 1941, on recensait environ 110 000 Juifs en zone libre. Au fur et à mesure de la multiplication des rafles en zone occupée, et surtout après le début des déportations, en mars 1942, «Franchir la ligne de démarcation» représente l’ultime espoir. Dans cette zone dite libre, 10 000 hommes, femmes et enfants juifs, qui se croyaient à l’abri au-delà de la zone de démarcation, sont raflés par des gendarmes et des policiers français. Certes, les Juifs se sentent moins menacés qu’en zone occupée. En zone libre, il n’y a pas de Gestapo, et certaines mesures antijuives entrent en vigueur un peu plus tard. La zone libre est sous la seule souveraineté du gouvernement de Vichy. Dès lors, cette zone libre devient immédiatement un havre de paix et un canal de survie pour les réfugiés juifs affluant de toutes parts.

2) Mise en place technique des camps

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Camp de Brens, mars 1942, site APSICBR.

Sur le point technique, les camps se sont construits entièrement sur des champs complètement vides. Cependant. Un deuxième type de construction est en vigueur : la construction des camps sur ses bâtiments déjà existants. Par exemple les camps de Rieucros et de Brens. Du côté du camp de Rieucros il a été créé par décret datant du 21 janvier 1939. Le terrain était une priorité de l’hôpital de la ville de Mende qui le loue à la préfecture. Pour le camp de Brens, le terrain appartenait à deux frères qui servaient de base aux ouvriers d’avant-guerre qui réhabilitent le pont le plus proche. 

3) Premiers internements

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Archives départementales, Documents et sources pour l’histoire de la Seconde Guerre mondiale, Vol.2, répertoire numérique

En septembre 1939, les ressortissants des « pays ennemis » réfugiés en France font, en raison de leurs nationalités, l’objet de mesures d’internement : le statut de réfugié politique ne prévoit alors nullement sur le critère d’appartenance à un pays ennemi. Parmi ces internés se trouvent de nombreux intellectuels antinazis et des Juifs qui ont fui les persécutions. L’internement administratif vise des personnes non pour ce qu’elles ont fait (ou sont présumées avoir fait) mais pour le danger potentiel qu’elles représentent aux yeux du pouvoir. La première loi autorisant l’internement administratif remonte au 12 novembre 1938. Il visait ce qu’on appelait alors les « étrangers indésirables ». Symboliquement puissant, car c’est pour cette catégorie que le premier camp a été ouvert à Rieucros, en Lozère.

Dès lors, le camp de Rieucros passe de « centre de rassemblement d’étrangères » à  « camp de concentration » en janvier 1941, il accueille au départ des hommes étrangers considérés comme suspects de troubles à l’ordre public, en octobre 1939 ils sont déplacés au camp disciplinaire du Vernet d’Ariège : la place est ainsi libre pour les femmes étrangères indésirables, parfois enfermées avec leurs enfants. Avec le gouvernement de Vichy, la population du camp s’élargit à des Françaises suspectes pour raisons politiques ou pour « mœurs douteuses ». Au printemps 1942, les camps français d’internement prirent leur place dans la nouvelle logique allemande : la mise en œuvre de la solution finale en France. Ce sont les réfugiés espagnols fuyant les armées franquistes qui représentaient, et de loin, la catégorie d’internés la plus nombreuse entre 1938 et 1940. Cela ne veut pas dire qu’il n’y eut plus d’internés politiques dans les camps, de nomades, de droits communs.

II- Les camps d’Occitanie

1) L’internement en Occitanie

Archives départementales, Documents et sources pour l’histoire de la Seconde Guerre mondiale, Vol.2, répertoire numérique

Dès la déclaration de la guerre, en septembre 1939, les ressortissants des « pays ennemis » réfugiés en France font, en raison de leurs nationalités font l’objet de mesures d’internement. Parmi ces internés se trouvent de nombreux intellectuels antinazis et des Juifs qui ont fui les persécutions.

Il existe plusieurs types de camps, les centre d’accueil pour réfugiés espagnols en place entre octobre 1939 et novembre 1940 et les centre d’hébergement pour réfugiés juifs étrangers effectifs entre novembre 1940 et mars 1941. Les autorités espèrent pouvoir mieux réguler le flux de réfugié·e·s à l’aide d’une loi qui autorise l’internement des « indésirables étrangers ».

Un premier camp est construit à Rieucros, dans le sud de la France. D’autres ne sont constitués au départ que de tentes, puis de baraques en bois ou de bâtiments en dur. Le déclenchement de la guerre avec l’Allemagne se traduit par l’édification de douzaines de camps dans la zone non occupée de la France. Il s’agit d’y emprisonner les « ressortissants de puissances ennemies » et les « individus dangereux pour la défense nationale ou la sécurité publique ». En 1939-1940, l’internement demeure une mesure d’exception. Puis il devient un pilier des politiques répressives du régime de Vichy à l’égard des « indésirables », en premier lieu des Juives et Juifs étrangers venus se réfugier en France. Fin 1940, près de 50 000 personnes, en majorité juives, sont détenues dans les camps de la zone libre.

2) La vie dans les camps : l’exemple du camp de Rieucros

Le camp de Rieucros est effectif de 1939 à 1942, il comprend sur cette période une population maximum de 800 personnes. Il s’agit de femmes, en majorité politiquement engagée.

Dessin de Flora Süssmann, Dans la baraque, extrait de Camps de femmes de Mechthild Gilzmer

A Rieucros chaque journée se ressemblent, avec les mêmes horaires, les mêmes corvées . Seule la correspondance fait varier le quotidien et marque un lien avec le monde extérieur. L’espace de vie principale est la baraque, où chacune sur sa couchette peut tenter de se recréer un semblant d’intimité. Cela reste complexe, une baraque contenant à peu près 80 femmes, ce qui induis une grande promiscuité.

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Dessin de Flora Süssmann, Dans la baraque, extrait de Camps de femmes de Mechthild Gilzmer

La direction du camp a constamment cherché à procurer du travail aux femmes internées. Il s’agit généralement de confection de vêtements pour l’armée française censé être rémunéré mais dont le contrat n’est pas toujours respecté. Elles fabriquent également des objets en quantités considérables tel que des vêtements, des bijoux, des jeux… Par exemple, la fabrication de bouton finit par se transformer en une réelle entreprise de vente de boutons avec un commerçant de Mandes. Cet argent récolté par les internées dans le but de pouvoir acheter de la nourriture à la cantine.

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Au travail. Mechthild Gilzmer, Camps de femmes.

Au début l’approvisionnement est suffisant, mais les choses se dégradent en même temps que l’avancée de la guerre. Les deux repas ont lieu à midi et le soir et se composent essentiellement de soupe de légumes (haricots, rutabaga…) à laquelle on ajoute quelques rare fois un peu de viande. Avec ceci elles ont droit à 200g de pain. Au début elles ont droit à du poisson tous les lundis. Celles qui avaient de l’argent n’eurent pas à souffrir de la faim en tout cas au début, pouvant se procurer divers produits en payant. En effet le camp stock pour 14126 francs de nourriture parmi lesquels du chocolat, du saucisson du fromage et même du vin ou de la bière.

Le manque de nourriture a eu des effets néfastes sur leur santé. Lors de l’arrivée au camp les internés doivent se soumettre à une visite médicale. Par la suite les seuls malades peuvent accéder à l’infirmerie, seul endroit du camp dans lequel on trouve de vrais lits. Règlement du camp stipule qu’est prévue une visite médicale quotidienne. La réalité est autre, en effet le rapport du camp du mois de décembre 1941 mentionne deux visites médicales hebdomadaires. Outre les grippes, maux d’estomac et de têtes subviennent la tuberculose, des maladies vénériennes, la dysenterie et les fausses couches. De nombreuses femmes furent soignées dans des hôpitaux à l’extérieur du camp. (Mandes, Montpellier..) De plus la plupart des femmes connaissent un arrêt de leurs règles. Le seul nouveau-né qui vit le jour mourut quelques jours plus tard, ce fut la seule répertoriée dans le camp. En général les conditions d’hygiène sont meilleures à Rieucros que dans les autres camps français mais le manque de nourriture et de soin accentué tout au long de la guerre affaiblit fortement les femmes et les rendent vulnérable à tous types de maladies.

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Dora Schaul. Les femmes ramenant la soupe au camp tiré de Camps de Femmes de Mechthild Gilzmer

Contrairement aux camps d’extermination allemands, les camps français n’étaient pas destinés à la diminution ou à l’élimination physique des êtres humains par le travail, la maladie ou l’exécution. Les internées organisaient des conférences ou des cours de langues proposés par les femmes spécialisées grâce à leurs formations respectives. Elles mirent même en place des cours de gymnastique mais très vite n’en eurent plus la force à cause du manque de nourriture. L’art est pour les internées une manière de garder et entretenir leur humanité dans un contexte inhumain. Les femmes peignent beaucoup Rieucros de manière plus ou moins réaliste : Dans son œuvre Tanguy , Michel Del Castillo évoque le cas de Rachel, une internée qui peint le camp de manière irréaliste, « comme une maison de poupée ». Lorsqu’on lui en fait la remarque, celle-ci répond « Pour moi voyez vous, c’est presque une chance d’être ici. J’ai réussi à échapper aux camps nazis. Ceux-là sont moins drôles, je crois » Les internées ont d’autres activités telles que la création et la mise en scène de pièces de théâtre, ainsi que l’organisation d’expositions et qu’elles inaugureront. Elles fêteront également la journée internationale des femmes.

III. Vers la déportation


1- Les différentes destinations de déportation

Ces camps de réfugiés vont très vite devenir au fil des mois des camps d’internement puis des camps de concentration. Certes, ces camps n’ont pas connu l’horreur absolue des lieux d’extermination, mais Vichy a su en faire des antichambres de la Solution finale. Des convois entiers en sont partis, dès août 1942, acheminant de nombreuses familles juives vers Auschwitz via Drancy..

Le camp d’extermination fut aussi l’ultime voyage pour quatre convois de familles juives parties en 1942 des camps de Noé et du Récébedou, près de Toulouse. Cette année-là, Monseigneur Saliège, archevêque de Toulouse, évoquait les scènes d’épouvante à l’intérieur des deux camps, tout en rappelant que les Juifs «sont nos frères comme tant d’autres».

Aucun département d’Occitanie n’a échappé aux rafles qui vont se multiplier avec l’invasion de la zone libre La rafle débute le 26 août 1942 à l’aube, dans toute la zone sud. Les forces de police et de gendarmerie, les gardes mobiles, les militaires et même les pompiers sont mobilisés. On utilise les fiches de recensement des Juifs établies du temps du gouvernement Darlan. Les Juifs sont ramassés dans les camps d’internement, les bataillons de travail, les résidences surveillées, les pensionnats catholiques et protestants, et on procède à des traques en forêt. À la mi-journée, le nombre d’arrestations ne dépassant pas 3 500 personnes, chiffre très inférieur aux prévisions, il est rappelé aux préfets par les services de Bousquet que, si leurs parents sont livrables aux Allemands, on doit procéder à la déportation des enfants de 2 à 16 ans. Des camions et des bus loués à des entreprises privées effectuent le transport des déportés des lieux de regroupement aux camps d’internement, puis jusqu’aux gares..

Début 1942, les internées de Rieucros sont transférées à Brens, près de Gaillac, dans le Tarn.

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Camp de Brens, mars 1942, site APSICBR.

Les régions organisent des «centres de criblage» pour regrouper les prisonniers et examiner leurs éventuelles exemptions. Au moins 45 autres femmes, « précédemment internées à Rieucros », dont 32 depuis le camp de Brens, ont été déportées par la police française et la Gestapo à l’été 1942  

Pour en savoir plus sur le camp de Brens

2- L’enfermement des suspectés de collaboration et l’occupation nazi en attente de jugement

Si la Libération du territoire se fait dans la liesse populaire, elle est aussi une période durant laquelle vont s’exprimer les rancœurs accumulées durant ces quatre années d’Occupation. L’épuration permet d’évacuer et de juger les collaborateurs (et fidèles) du régime de Vichy dans les secteurs administratifs et économiques notamment. A Rivesalt par exemple les derniers internés sont dispersés vers d’autres camps, tels Gurs ou Saliers, ou transférés dans des Groupements de Travailleurs Étrangers. À la Libération, le camp de Rivesaltes devient un centre de séjour surveillé pour les personnes suspectées de collaboration (1944-1945),et un Dépôt de prisonniers de guerre de l’Axe (1944-1948). Il pouvait s’agir du vrai collaborateur comme misérable dénoncé par un voisin. On y trouve des Allemands, des Autrichiens, des Italiens et des Hongrois, mais aussi des Espagnols et des Soviétiques. De nombreux détenus sont alors employés à divers travaux dans la région, jusqu’à leur libération.

3-Les camps conservation ou démantèlement

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La camp de Rivesaltes aujourd’hui. Mémorial du camp de Rivesaltes

Suite à la libération certains camps sont devenus des mémorial pour ne jamais oublier et permettre d’avoir des lieux de commémorations et de recueillement comme le mémorial de Rivesaltes, inauguré en octobre 2015, le Mémorial est construit au milieu des vestiges des baraquements, témoins du destin de plus de 60 000 personnes. Cette marque dans l’espace en fait un lieu unique, qui rend compte des traumatismes du second vingtième siècle. Néanmoins le cas du camps de Rivesaltes n’est pas une généralité . A la fin de l’occupation la majorité des camps sont démantelé comme le camp de Rieucros qui a fermé en 1942 . Et dont aujourd’hui il ne reste plus rien à part une stèle ou le camps de Brens qui a était restitué à ses propriétaires après la libération . Dans ce camps il reste quelque baraquement qui servent de garages et le mirador .

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Camp de Brens aujourd’hui. Photo de Matthieu Palat.

Ce camps a pue servir pour des camps de vacances , il est aujourd’hui laissé à l’abandon néanmoins des projets de rachat du camps subsistent . Aujourd’hui, une association se bat pour la mémoire du site et de toutes les femmes qui y ont été internées.

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Camp de Brens aujourd’hui. Photo de Matthieu Palat.

Voici la bibliographie non exhaustive qui nous à permis de traiter ce sujet :