Personnage bien étonnant que Jean-De-Dieu Soult. Stratège hors pair, Homme de main de Louis-Philippe, agent du développement du Sud-Tarn durant une bonne partie du XIXe siècle, il fut un homme ayant su sortir de son cadre mazamétain pour devenir un personnage national. Sa mort n‘éteint pas l’aura qui l’a entouré dans le sud du Tarn, puisque celle-ci, ainsi que sa richesse et son implantation sont bénéfiques pour ses descendants : c’est en se basant sur ces points précis que la famille Reille-Soult, issue de l’union de la petite fille de Jean de Dieu et du Baron Reille, étendit son pouvoir sur le Sud du Tarn. Il faut donc se demander, à ce titre : Quel legs Soult laisse t-il à Mazamet et à la France en général ?
La carrière d‘un maréchal d‘Empire (1769 – 1815)
Jean de Dieu de Soult est né le 29 mars 1769 à Saint-Amans-la-Bastide. A la mort de son père, en 1779, il se voit attribuer la succession de son étude notariale. Mais cette orientation ne lui convenant pas, il s’engage dans l’infanterie en 1785. La Révolution permet à nombre de soldats, quelquefois de piètre condition, de connaître une ascension fulgurante alors que l’organisation des hauts rangs de l’armée royale était réservée aux nobles. Soult est un bon exemple, puisqu’il devient général de brigade en 1794, rôle d’importance dans les manœuvres des Armées, notamment dans les campagnes de l’Allemagne où il combat de 1795 à 1796.
En 1804, Soult est finalement promu maréchal d’Empire, en raison de ses capacités militaires reconnues et la célérité de ses troupes. Il sut prouver ces capacités lors de la Bataille d‘Austerlitz (1805), où il fut un général décisif dans la victoire française. Par la suite, de 1808 à 1814, Soult dût, en Espagne, se confronter aux Espagnols révoltés alliés aux Anglais, menés par le duc de Wellington. A la fin 1813, le reflux de l’Empire, après la calamiteuse campagne de Russie, se fait aussi ressentir en Espagne. En effet, l’armée anglo-portugaise de Wellington attaque le nord de la péninsule, avec l’objectif d’invasion de la France par le Midi. Arrivé à Toulouse le 24 Mars 1814, Soult sait qu’il ne peut pas éviter l’invasion alliée. Apprenant l’abdication de Napoléon le 6 Avril, il décide d’évacuer la ville le soir même, après une âpre bataille.
Soult trouve finalement une soudaine vocation royaliste lorsqu’il rejoint le camp des Bourbons en juin 1814. Cependant, même si Soult critiqua le retour de Napoléon de l’Île d’Elbe le 1er mars 1815 et le considéra comme un « hors-la-loi », cela ne l‘empêcha pas de lui demander un poste de major-général, obtenu le 9 mai 1815. Enfin, son rôle dans la bataille de Waterloo est contrasté. En effet, Soult est souvent présenté comme le responsable puisqu’il n’aurait pas rappelé le maréchal de Grouchy à temps pour contrer les prussiens en renfort, mais les historiens modernes ont pu prouver que Soult avait averti Napoléon de la dangerosité des armées anglaise et prussienne. Après les Cent-Jours, Soult comprend sa situation précaire et retourne à Saint-Amans.
Une « reconversion professionnelle » (1815-1852)
Il s’exile en Allemagne, à Barmen, dès Juillet 1815 ; en effet, la Chambre des pairs avait décidé de l’exil de nombre d’anciens généraux ayant collaboré avec Napoléon durant les Cent-Jours. Revenu en France en 1819, il s’affirme fervent royaliste, ce qui lui permit d’être élevé Pair de France en 1827 par Charles X. Nommé par Louis-Philippe ministre de la Guerre de 1830 à 1834, il est chargé de la réorganisation de l’armée de ligne. Nommé président du Conseil des ministres en 1840, il abandonne cependant sa charge de ministre de la Guerre en 1845, et le 19 Septembre 1847, il démissionne de son titre de président du Conseil. Retiré à Saint-Amans, il meurt le 26 Novembre 1851.
Soult décide de faire construire, de 1827 à 1829, le château de Soult-Berg, nommé ainsi d’après son patronyme et celui de sa femme. De style sobre, le château Soult-Berg se trouve dans son territoire natal. Le pouvoir économique de Soult tient probablement de ses gains en tant que président du Conseil, revenus qu’il a pu capitaliser par l’achat de ces terres autour de Soult-Berg, permettant de vivre de ses rentes. Soult a aussi soutenu l’économie mazamétaine lors de son passage au ministère de la Guerre, en chargeant l’industriel mazamétain Pierre-Elie Houlès de confectionner des molletons et des draps pour l’armée. Son aura fut suffisamment puissante pour que, le 3 décembre 1851, la ville de Saint-Amans-Labastide soit renommée Saint-Amans Soult en son honneur.
La Dynastie Reille-Soult, héritière du Maréchal (1890-1924)
Bien que la lignée des ducs de Dalmatie disparaisse officiellement avec le fils de Soult, Napoléon-Hector, en 1857, le legs de Soult fut transmis à la fille de ce dernier, Geneviève. En 1860, elle se maria avec le Baron René Reille, fils d’un autre maréchal d’Empire anobli, participant à la création d’une nouvelle dynastie, les Reille-Soult. Reille, député monarchiste de 1871 jusqu’à sa mort en 1898, n’hésite pas à perpétuer cette stratégie avec d’autres grands noms du Tarn. Il marie ainsi sa fille Marie-Louise au marquis de Solages, propriétaire des mines de Carmaux. Enfin, même si le titre de duc de Dalmatie ne peut plus être porté officiellement,les fils d’André Reille disposent de l’autorisation d’utiliser le nom de Reille-Soult, duc de Dalmatie, en titre de courtoisie, dès 1910.
Leur pouvoir s’implante dans le temps long, car les membres de la dynastie se relaient tour à tour dans l’exercice de la charge de député, sous trois générations, de 1871 à 1958. Or Même si Xavier Reille est battu à la première circonscription de Castres en 1910, la seconde, menée par Amédée, reste entre les mains de la dynastie et n’en sort provisoirement qu’en 1924. La circonscription de Mazamet reste donc comparable à un fief électoral conséquent.
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Soult était un homme militaire de son temps, utilisant les stratégies de l’époque. Bien que sa moralité et sa loyauté soient toutes relatives, cela n‘enlève rien à ses capacités militaires et tactiques certaines. Il s‘agit aussi, de sa part, d‘une intelligence politique : cette loyauté très faillible lui permit de „sauver sa tête“ à plusieurs reprises lors des bouleversements politiques français. Il faut certainement une bonne capacité politique pour que, s‘affichant fervent partisan de Charles X avant 1830, on puisse devenir président du Conseil des Ministres sous Louis-Philippe. Ce sont ces postes et ces honneurs qui permettent une certaine accumulation de ses richesses, jouant tels les fondations de la Dynastie Reille-Soult survenant quelque temps plus tard, usant des mêmes réseaux économiques et politiques.
Une bibliographie non-exhaustive est proposée dans cette page annexe :
Etudiant.es : L2 : GAILLAC Maxime (L2) et DELAIRE Nicolas (L2), Piquet Sarah (L1) et Pages Laura (L1)