Durant les différents gouvernements qu’a connu la France entre 1938 et 1946, les préfectures ont dû s’adapter aux différentes politiques mises en place par les gouvernements successifs que la seconde guerre mondiale a engendré. La mise en place des camps, qui commença dès 1938, a directement touché les préfectures qui ont dû organiser la réquisition du terrain et construire les camps d’internement administratif.
Dans ce processus, les préfectures n’ont pu en aucun cas protester contre les décisions gouvernementales mais cela ne veut pas dire que ces dernières étaient d’accord avec ces pratiques. En effet, les préfectures étant une délégation du pouvoir de l’état au niveau régional, elles se doivent d’appliquer les décisions gouvernementales. Par conséquent, aucune préfecture n’a protesté contre la construction d’un camp d’internement administratif sur leur périmètre entre 1938 et 1946.
En effet, la majorité des différents préfets ont exécuté les ordres venant des différents gouvernements dans le but de rester en place et sans arrière pensée idéologique. Les préfets se montrèrent en grande majorité prudent dans l’exercice de leurs pouvoirs. Notamment sous le régime de Vichy entre 1940 et 1944 où les préfets se devaient de rester en poste, la fuite leur étant exclue. Cependant, même s’il n’y a pas eu de protestations de la part des préfectures envers le gouvernement, de nombreux préfets ont quant à eux protesté de façon officielle pour dénoncer le fait que les préfectures manquaient de moyens de surveillance et de fonctionnement afin de faire fonctionner les camps d’internement administratif correctement.
En effet à partir de fin 1940, les camps d’internement administratif français sont touchés par de graves pénuries qui se sont avérées assez importantes lors des hivers 1941 et 1942. Les différentes inspections dans les camps d’internement administratif ont permis de faire remonter au gouvernent les nombreux problèmes auxquels été confrontées les préfectures concernant le bon fonctionnement des camps.
À cela nous pouvons aussi ajouter les querelles entre préfets, c’est le cas du camp de Pithiviers qui a vu le préfet délégué au camp protester contre le préfet régional au sujet de la gestion du camp de Pithiviers dans le Loiret.
Les préfectures étant une délégation du pouvoir de l’État, il n’y a pas eu de résistance de la part de celles-ci vis à vis de la mise en place des différents camps d’internement administratif dans le sud-ouest de la France. Cependant, certains préfets ont décidé de rentrer dans la résistance et ont commis quelques actes clandestins en opposition aux camps d’internement administratif, c’est notamment le cas de Jean-Marie Joseph Chaigneau qui fut préfet du Tarn en 1940.
Afin de coordonner et organiser au mieux la résistance française, l’organisation Noyautage des Administrations Publiques (NAP) a été mise en place en 1942 et était dirigée par Albert Chambon. Cependant le NAP ne deviendra effectif que lors de l’assimilation des mouvements de résistances de la zone sud, « Combat » de Henri Frenay et Berty Albrecht, « Franc-Tireur » de Jean-Pierre Lévy et « Libération-Sud » du résistant Emmanuel d’Astier de La Vigerie, dans les Mouvements Unis de la Résistance (MUR) en 1943. Le NAP qui s’est alors étendu à la zone occupée, avait pour objectif d’obtenir des informations pour la France libre et pour la sécurité des résistants, de saboter les administrations ou encore de fournir des faux papiers aux agents de la France libre en infiltrant les administrations de l’État français de Vichy.
André Plaisantin, un des responsables du groupe Combat à Lyon, est le principal investigateur du Noyautage des Administrations Publiques. C’est lui qui eut l’idée de rassembler les cellules de résistances des administrations dans une seule organisation nommée à l’origine « Noyautage administratif et professionnel ». Le nom fut alors changé en « Noyautage des administrations publiques » par Marcel Peck, responsable de la région lyonnaise du groupe Combat, et Claude Bourdet. C’est alors que ce dernier proposa l’idée à Jean Moulin afin d’étendre le NAP à tous les mouvements de résistances français. De plus, c’est à cette période que le NAP est utilisé afin de choisir les futurs représentants de la France libérée en sélectionnant les « fonctionnaires à maintenir, à remplacer ou à sanctionner » au moment de la libération. Ce mouvement s’émancipera pour donner par la suite le groupe Résistance-Fer.
Sous le régime de Vichy, une véritable organisation résistante s’est mise en place afin d’infiltrer l’administration française dont font parties les préfectures. L’exemple de Jean-Marie Chaigneau, qui fut préfet du Tarn en 1940, est significatif de cette résistance des responsables administratifs qui, ne pouvant pas protester ouvertement et directement contre les décisions gouvernementales, se réfugient dans la clandestinité. Au total sur les 1500 agents que constituera le Noyautage des Administrations Publiques, 120 seront déportés et/ou tués dont un des responsable du mouvement de résistance Combat et un des principaux investigateur du NAP: Marcel Peck.