Comme nous l’avons vu, l’environnement du camp d’internement peut amener des comportements violents de la part du personnel en charge de la surveillance. Nous pouvons ainsi exposer trois cas particuliers.
Le premier s’est produit au camp du Vernet, réputé pour être un camp au régime disciplinaire très dur et strict. En effet, un ancien combattant des brigades internationales s’étant approché trop près des barbelés (à moins de 10 mètres), fut abattu par la garde du camp. Cette exécution, avait donc pour simple motif une infraction minime au règlement1.
Le deuxième cas nous est raconté par un ex-interné, Francisco Diaz Munoz, réfugié espagnol arrivé en France lors de l’épisode de la Retirada. Il nous raconte les conditions d’internement au camp de Septfonds du Tarn-et-Garonne, ainsi que l’accueil qui leur a été accordé par l’administration française. Pour lui, ils ont été rapatriés et traités comme des voleurs, des assassins ou encore des criminels, étant parqués dans des champs en plein mois de janvier et février. L’épisode le plus marquant de son témoignage : « Un jour un homme d’un certain âge, franchit, je ne sais pas trop comment, la première enceinte de barbelés afin de récupérer un paquet de cigarettes qui se trouvait dans le couloir séparant les deux rangées de barbelés. Un sénégalais qui patrouillait à cheval se précipita sur lui, asséna un grand coup de sabre, puis il descendit de cheval et entreprit de rouer de coups de pied avant d’appeler un autre sénégalais qui évacua le malheureux en le tirant par les pieds, comme s’il s’agissait d’un animal mort ». Francisco Diaz Munoz nous raconte ensuite qu’ils n’ont plus jamais eu de nouvelles de cet homme, ils présumaient qu’il était sans doute mort. Il nous apprend aussi que certains gendarmes étaient aussi impliqués dans certains actes de violence2.
Le dernier cas que l’on peut observer s’est produit au camp de Noé. Un interné avait réussi à s’évader mais fut repris par la gendarmerie (qui s’occupait des affaires d’évasions), il fut renvoyé au camp. Cet homme s’était Rémi A., il rédigea ensuite une lettre : « J’ai été arrêté en essayant de m’évader, bestialement brutalisé et […] on m’a battu en me cassant plusieurs dents ». Ce témoignage est d’autant plus étonnant que, à l’inverse du camp du Vernet, le camp de Noé avait une réputation de camp plutôt calme. Le règlement stipule ainsi que toute tentative d’évasion peut être « réprimandée par la violence après sommation »3.
Ces actes de violence ne sont pas isolés, mais il faut tout de même relativiser, ils ne sont pas non plus une généralité. Le camp de Brens, par exemple fut un camp calme ou aucun acte de ce type ne fut remarqué par les internées.
1Guérilleros en terre de France, Les républicains espagnols dans la résistance française, Le temps des cerises, 2004.
2Diaz Munoz F., « Mémoires de Francisco Diaz Munoz » in Revue du Tarn, n° 195, pp. 497-509, 2004.
3Faulet P., Le camp de Noé, de novembre 1942 à sa dissolution, mémoire de master, 1991.