Au début du mois d’août 1944, il règne dans les rues de Paris une atmosphère insurrectionnelle. Emmenée par les FFI, la réaction intérieure grandit : une grève des policiers le 15 août signale l’imminence d’une révolte des parisiens contre les troupes allemandes en poste dans la capitale. Charles Danglade, Inspecteur Général à la Banque de France, est alors président du comité CRF du 1er arrondissement de Paris. En prévision de combats meurtriers, il décide avec le docteur André Meunier, responsable des secouristes du 1er arrondissement depuis 1942, de monter 17 postes de secours répartis dans l’arrondissement. Leur mise en fonction a lieu le 17 août. On hisse le drapeau Croix-Rouge dans les quelques crèches, dispensaires et écoles de l’arrondissement mais aussi… dans le hall de la Comédie Française, place du Palais Royal. Personnels, artistes et comédiens du célèbre théâtre s’engagent sans tarder auprès des volontaires Croix-Rouge. Les nouveaux secouristes s’appellent René Alexandre, Jean Chevrier, Lise Delamare ou encore Jean-Paul Sartre (il fait jouer à l’époque Huis-Clos). Dans la discrétion, ils assistent les équipes d’urgence, s’occupent de logistique et prodiguent parfois, comme Sartre, les premiers soins aux victimes. Mercanton, artiste-comédien, prend possession d’un autobus qui sert, pendant toute cette période, de transport inter-postes et d’ambulance annexe.
L’insurrection des parisiens débute le 19 août, au lendemain de l’appel lancé par le colonel Rol. Pour améliorer la couverture sanitaire dans l’arrondissement, un nouveau poste de secours est ouvert le 22 août au Théâtre Français, sur proposition de l’administration de la Comédie Française. Les combats font rage sur la place du Palais-Royal : médecins, infirmières et comédiens relèvent plus de dix blessés graves par jour, allemands comme combattants des FFI. « Bien que nous espérions tous l’arrivée rapide des troupes du général Leclerc et le départ de l’occupant, nous portions assistance à tous selon le principe de neutralité, se souviendra André Meunier. Les blessés, d’ailleurs, étaient en majorité allemands. Nous devions le plus souvent arracher aux flammes des soldats presque entièrement brûlés, les amener au Service de Santé de leur armée ou, pour les plus graves, à l’Hôtel Dieu ».