1974-2000 : l’action sociale dans une société fragilisée

Média SDF
La visibilité des SDF dans la presse

Comme nous l’avons déjà vu, la pauvreté à la fin du XXe siècle est légalement définie. C’est en cette fin de siècle, alors le chômage est le mécanisme le plus fréquent d’entrée dans le monde de la pauvreté, que ressurgissent les clivages entre «bons pauvres » et « mauvais pauvres ». Après la crise de 1974, le chômage s’accroit et ancre une multitude de personnes dans la pauvreté, notamment quand la privation de travail est de longue ou de très longue durée, ce qui pérennise le risque d’entrer dans une pauvreté durable, et une inadaptation chronique[1]. La privation d’emploi est un des motifs les plus importants d’une situation précaire : la loi de 1973[2] protège les salariés en encadrant les motifs de licenciement[3]. Les modèles de pauvres sont toujours les mêmes qui perdurent : les SDF, essentiellement une population jeune et masculine[4]. Mais de nouvelles sont créées par les évolutions sociales comme les familles monoparentales, apparues avec le déclin de la famille nucléaire. Cette pauvreté, même en fin de siècle, se ressent au niveau du mal logement, toujours un signe de pauvreté : les personnes mal logées, sans logement, ou vivant dans des structures d’accueil sont au nombre de 2 248 000[5].

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La distribution du RMI en France à l’aube du XXIe siècle

Pour faire face à cette pauvreté persistante, l’Etat tente d’intervenir. Pour ce qui est de l’accompagnement plus concret des plus pauvres, l’Etat crée en 1988 le RMI ou Revenu Minimum d’Insertion, afin de donner aux plus nécessiteux un revenu fixe, pour faciliter la réinsertion de ces personnes marginalisées à l’aide d’un revenu régulier[6].

 Enfin, au niveau de l’action sanitaire, au vu du fait que les plus pauvres ne pouvaient pas cotiser et n’étaient donc pas assurés malgré la mise en place de la Sécurité Sociale en 1945, la CMU (couverture maladie universelle) est créée en janvier 2000 : les personnes âgées de plus de 16 ans peuvent désormais adhérer au système de base de sécurité sociale[7]. La CMU rend possible l’accès à une assurance maladie pour toute personne en situation de fragilité économique[8]. Mais l’Etat n’est pas le seul à oeuvrer dans l’intérêt des plus fragiles : les œuvres privées s’organisent et évoluent.

Resto du coeur
La « média-association » : les Restaurants du Coeur

 A la fin du siècle, un renouveau associatif voit le jour : la « média-association » qui est le reflet d’une société médiatisée. Ce phénomène se remarque notamment avec les Restaurants du Coeur de Coluche, créés en 1985[9]. Cette médiatisation nouvelle permet de rendre visible et de concerner l’opinion publique, à travers la figure de personnes célèbres par exemple.

Si de nouvelles associations naissent, les plus anciennes sont encore très présentes : c’est le cas de la Croix-Rouge française. Cette dernière était auparavant impliquée dans le secours d’urgence durant les deux guerres mondiales, auprès des populations civiles tout comme sur le front, et elle continue son évolution. Elle s’implique dorénavant auprès des plus pauvres, dans les grandes questions sociales de la fin du XXe siècle, notamment auprès des chômeurs, le chômage étant le maux de cette fin de siècle[10]. Elle tourne de plus en plus ses actions vers l’humanitaire à l’étranger[11] et en interne, en France, intervient dans des cas de vulnérabilité sociale. Cependant, la Croix-Rouge est toujours une organisation parapublique : les dons se raréfient, et le subventionnement de l’Etat se fait moins conséquent[12]. La Croix-Rouge française a aussi recours à de grandes figures médiatiques, comme Adriana Karembeu, impliquée depuis 1999, devenant ambassadrice en 2003[13].


[1] François Caron, Histoire économique de la France : XIXe – XXe siècle, Paris, Armand Colin, 1995, pp329-330

[2] André Gueslin, op cit, p164

[3] Ibid

[4] André Gueslin, op cit, p256

[5] André Gueslin, op cit, p143

[6] André Gueslin, op cit, pp165-166

[7] André Gueslin, op cit, p156

[8] Ibid

[9] André Gueslin, op cit, p229

[10] Frédéric Pineau, La Croix Rouge française : 150 ans dhistoire, Paris, Autrement, 2014, p189

[11] Ibid

[12] Ibid

[13] Frédéric Pineau, op cit, p206