Elle,
la montagne.
Quand je pense à elle,
je ressens cet empressement
au fond de moi qui me supplie de la rejoindre.
Elle m’appelle, elle me manque, elle est la terre éternelle
devant laquelle je perds mon souffle et qui me fait me sentir vivante.
Marcher en montagne et explorer ses forêts, ses vallées, c’est comme se redécouvrir soi-même dans une nature vibrante et quasi-intacte. Trop souvent, nous les êtres humains oublions que l’on en fait partie. La montagne nous accueille, elle est magnifique, glorieuse et imposante. La montagne nous chasse, elle est colérique, imprévisible et fulminante.
Alors on s’y rend, on s’offre à elle, on accepte ses défis. On commence l’ascension et on s’oublie. Si on s’ouvre à elle et qu’on garde le silence, qu’on observe et qu’on écoute, pendant un instant on peut entendre la nature qui chuchote, qui hume, qui hurle, rit, chante et pleure. On entend ses millions de cœurs et leurs battements capricieux accordés pour n’en former qu’un seul : celui de la montagne. On entend le tintement des cloches des brebis et leurs bêlements qui suscitent le rire. On entend le fredonnement de la brise qui se fraie un chemin parmi les sapins et caresse l’herbe drue. On entend l’eau du torrent qui dévale ses flancs, entamant son périple vers l’océan. On entend les craves et leurs cris perçants, rivalisant avec les sifflements des marmottes.
Durant l’ascension, je m’arrête, je regarde mes pieds et je vois un petit scarabée qui peine à gravir un brin d’herbe. Puis je lève les yeux, aussi haut que je le peux, et je vois un oiseau de ferraille laissant derrière lui une traînée blanche qui redécore notre monde. Nous sommes trois êtres en pleine ascension. Lequel de nous est le plus dérisoire ? Qui atteindra le sommet en premier ?
La montagne nous prête son oxygène et sa vie,
puis elle nous regarde lui voler ses glaciers,
nous et notre ardeur dangereuse.
Elle se voit fondre :
la montagne est
en pleurs.
La montagne était là quand je suis née, elle sera là quand je mourrai. Elle m’aura accueillie et m’aura montré que c’est elle qui gagnera toujours, qu’elle, on ne pourra jamais la battre. Nous avons beau gravir ses plus hauts sommets, conquérir ses vallées, escalader ses pics escarpés, nous restons les êtres éphémères qu’elle regarde passer depuis des millions d’années. Elle est le témoin des changements et des évolutions, ses pleurs cesseront quand nous disparaîtrons.
Éternelle est la montagne.
Camille