Le XIXe siècle voit les Français envisager différemment la problématique que représentent les pauvres et l’importance de les aider. Devant la Chambre des députés, Lamartine tient un discours dans lequel il encourage l’homme qui « se ménage les moyens de ne pas recourir à la bienfaisance publique » à aider les pauvres, et qualifie les caisses d’épargne de « complément de moyens d’éteindre la mendicité ». La charité chrétienne, « qui entretient le pauvre dans une dépendance matérielle et morale », est parfois mise à mal par des propos qui vont dans ce sens et qui se font plus courants. La population a peur des vagabonds, qui sont certes rares mais sont plus visibles au cours de ce siècle, et voit également la pauvreté se rapprocher dans les rues et dans les campagnes. La limitation de la pauvreté devient donc une question importante à l’échelle nationale, que ce soit dans le domaine public ou dans les œuvres privées. Le contexte est donc tendu et il devient essentiel d’agir pour beaucoup de monde.
Comment l’État a-t-il fait muter sa politique contre la pauvreté, allant d’une répression affichée et sévère à une lutte plus ouverte et visant plus à aider les pauvres qu’à les éloigner ? Quelle est l’association entre l’Etat et les œuvres privées et comment la politique publique a-t-elle mené à une modification radicale de l’assistance privée ? Et, enfin, quelles sont les transformations lancées par la Troisième République pour améliorer l’assistance au pauvre à partir de 1870 ?
Pour répondre à ces questions, nous commencerons par étudier l’action de l’Etat au XIXe siècle, à travers la mutation des hôpitaux et la mutation des bureaux de charité en bureaux de bienfaisance, puis par la vision que le peuple a de ces aides et, enfin, par la tentative de laïcisation de l’assistance civile menée dès le début du siècle.
Ensuite, nous verrons les différentes actions privées et leur prolifération au XIXe siècle, d’abord par les quelques œuvres qui se maintiennent sur la même ligne au cours du siècle, puis par les nouvelles œuvres, soit proches d’anciennes, soit novatrices et, enfin, par celles qui ont observé une mutation pendant celui-ci. Finalement, nous verrons la mutation des actions sous la IIIe République, sous l’angle d’abord du logement et de la nourriture, deux grandes problématiques de la fin de siècle, puis sous l’angle de la portée de plus en plus souvent obligatoire des œuvres à cette époque.