L’activité viticole a du mal à se remettre de la crise du phylloxéra. Les vins à base de sucre de betterave furent une alternative à la consommation de vin lors de celle-ci. Ces vins subsistèrent dans les nouvelles habitudes de consommation des Français, notamment durant les années 1890 et ce en dépit de la loi Griffe du 14 août 1889. Cette loi énonce clairement que ne sont considérées comme vin seulement les boissons alcoolisées à base de raisin. De plus, d’autres éléments engendrent une concurrence avec des vins « falsifiés ». Le comité consultatif d’hygiène publique constitué auprès du Ministère de l’Industrie et du Commerce distingue le plâtrage, des vins de raisins secs. Les techniques de coloration du vin, répandues au XVIIIe siècle connaissaient un essor dans le dernier quart du XIXe siècle. La coloration permet de faire face à l’insuffisance de l’offre. Outre cela, on s’aide des mutations techniques du siècle pour accélérer la fermentation ou encore permettre « une tenue » au vin. La falsification du vin se place ainsi au carrefour des intérêts pour les vignerons et l’Etat fait placarder des affiches contre la falsification et le vin fait de betterave (illustration en annexe tirée du musée). La « crise » du petit vigneron crée des préoccupations, on passe des formes d’intervention fiscales traditionnelles à la mise en place d’une Sozialpolitik.
Cependant, en plus d’une concurrence avec ces vins, de nouvelles concurrences ont mis mal à l’aise le vignoble français (et par conséquent le vignoble gaillacois également). En effet, les concurrences espagnole, italienne et algérienne (moins taxées), vont amplifier l’effet des vins falsifiés. Afin de contourner la réglementation, les vins avec du sucre de betterave sont utilisés comme étant des traitements médicaux. L’activité viticole française connaît donc en raison de ces concurrences une grave crise que l’on peut qualifier d’ouvrière. Il éclate un peu partout en France des grèves et notamment dans le Sud-Ouest. Dans le Tarn, la surproduction éclate davantage à Gaillac que dans les autres villes départementales. C’est ce que l’on appelle dans l’historiographie, la «crise des vignerons». Durant trois ans, soit de 1904 à 1907, cette crise commença dans les vignobles bordelais et se diffusa à l’ensemble du Sud-Ouest puis, plus singulièrement, au sein du vignoble de Gaillac.
Au niveau régional, les manifestations atteignent leur paroxysme lors de l’été 1907, les vignerons grévistes revendiquent une réglementation de la fraude et une protection plus importante des vins français. Les manifestations les plus importantes se font à Béziers, à Montpellier et à Narbonne. C’est à Montpellier qu’a lieu la manifestation la plus importante, réunissant environ 500 000 personnes. Les manifestants sont soutenus par le maire socialiste de Narbonne, mais aussi par l’ensemble des classes sociales de la ville. Le Midi est alors militairement occupé pour maintenir les grévistes, la plupart des dirigeants grévistes sont emprisonnés. De plus, des débordements aboutissent à des fusillades faisant six victimes. La crise est finalement résolue par le vote de deux lois, le 29 juin et le 15 juillet 1907, elles améliorent entre autre la réglementation du sucrage. De plus, elles imposent une déclaration des récoltes pour lutter contre les fraudes. Nous constatons en France une hausse de la production. Elle est estimée à plus de 95% dans les années 1905-1906. La surproduction cristallisa les marchés. Cette surproduction avait pour but de sortir de la crise du phylloxéra, en plantant de nouveaux pieds. De plus, le Gaillacois connaît une augmentation des spécialisations dans la viticulture. Néanmoins, la surproduction n’est pas présente dans toutes les régions voisines du gaillacois (recul dans l’albigeois et à Castres).
La compagnie ferroviaire aide à lutter contre le phylloxéra, étant elle-même touchée par la baisse de ces usagers. Elle offre à ses usagers des pulvérisateurs à soufre, et facilite l’importation des vins étrangers. Or, cela engagea de nouveaux frais en plus du manque à gagner généré par la crise. Les créanciers hésitèrent donc à prêter de l’argent devant l’insécurité du remboursement. Le vignoble souffre d’une crise sociale et d’une crise financière qui aboutirent à la fin des capitaux notables. Ils se détournèrent de l’agriculture et plus particulièrement de la viticulture, qui perd de sa superbe au profit des friches. L’incertitude domine les rapports économiques dans le dernier quart du siècle.