Impitoyable, le phylloxéra ne laisse que des vignerons ruinés. Les dégâts sont visibles dès 1875. Les vignerons désemparés tentent de réagir et ont recours à des méthodes inutiles pour réhabiliter leurs domaines, notamment en suivant les conseils de charlatans qui promettent des solutions miracles. En trente ans, on estime que le nombre d’hectares cultivés en France a chuté de 28%, ce qui correspond à une perte d’environ 660 000 hectares. Le coût total de l’invasion du phylloxéra fut estimé entre 5 et 10 millions de francs-or, et bien que ce chiffre soit invérifiable, il donne une idée de l’ampleur de la crise.
L’une des conséquences fut un exode massif vers l’Amérique du Sud et l’Algérie avec l’espoir de mener une reconstruction économique et de surmonter la crise. En effet, les ceps morts sont vendus 60 centimes pour 100 kilos, destinés à faire du feu, ce qui témoigne de la détresse dans laquelle se trouvent les vignerons. En Côte d’Or, la population rurale chute rapidement de 25 à 12%, beaucoup d’ouvriers perdent leur travail et se trouvent dans une situation extrêmement précaire. Dans le Tarn, en 1883, l’activité viticole est très dynamique et représente une production de 1150 255 hectolitres de vin pour 49 486 hectares. Cinq ans après, avec l’arrivée de la maladie, la production a chuté à 100 047 hectolitres pour 27 901 hectares. Dans la Marne, 6500 hectares de Champagne sont contaminés à partir de 1901, ce qui représente près de 50% de l’exploitation viticole du département. L’Italie et l’Espagne, qui ne sont pas encore contaminées par la maladie, vont profiter de l’affaiblissement des vins français pour se réapproprier le marché vinicole.
Une autre conséquence économique fut l’augmentation rapide du prix du vin, en raison de la chute de la quantité de matière produite. Le marché voit également survenir des vins frelatés vendus moins chers, ce qui créa une concurrence déloyale et déséquilibrée.
Des syndicats de vignerons se formèrent en vue de détruire le phylloxéra. En 1885, Thomas Bousquet publie une brochure très révélatrice du malaise des vignerons et de l’inefficacité des insecticides face à l’insecte, qui sont assez chers et souvent difficiles à utiliser. Les conséquences sont d’une importance sans précédent, comme en témoigne la rapidité de la propagation, les énormes dégâts sur la production et la qualité du vin. La carte ci-dessus présente les régions touchées par la maladie, elle illustre bien les ravages de celle-ci. La maladie aura touché quasiment toute la France, avec une forte concentration vers le Sud.
La crise agricole du début du XXème siècle trouve d’ailleurs son origine dans ce phénomène. La reconstruction du vignoble fut longue et difficile.