Vers une tradition des vendanges

Célébrations campagnardes et routine annuelle de la viticulture

Déjà sous la Rome ancienne, on constate que la date des vendanges n’est pas laissée au libre arbitre du vigneron, et qu’elle reposait plutôt sur une délibération publique durant laquelle la date de début des vendange était fixée dans l’intérêt général des producteurs comme des consommateurs. Puis tout au long du Moyen Âge tous les seigneurs, qu’ils soient laïcs ou clercs; disposaient de la liberté d’établir des proclamations publiques sur l’étendue de leur domaine. Ces proclamations sont des droits de bans : elles décrètent le ban, soit le début des vendanges. Ce ban ne pouvait être levé qu’avec l’accord du propriétaire des terres, qui priorisait la vente de son propre vin. Ce droit féodal de ban a été imposé par la dynastie mérovingienne, puis carolingienne.

Mosaïque de Saint-Romain-en-Gal. Calendrier agricole des vendange sur une vigne.
Mosaïque représentant le ramassage, qui précède le foulage des raisin, issue du calendrier rustique de Saint Romain en Gal, auteur inconnu, début IIIe siècle (source: wikipédia.org).

La date des vendanges n’est pourtant jamais fixe et varie chaque année, en fonction du climat et du type de sol. Il semble donc que la date des vendanges était plutôt le fruit d’une décision collective entre le seigneur et ses travailleurs, encore une fois pour choisir le moment le plus opportun et favoriser la production. Vendanger est une besogne relativement physique, comme les autres travaux de la terre, et il faut faire face aux nombreuses intempéries climatiques (chaleur, pluie, gel). De plus il faut savoir qu’une campagne de vendanges peut durer jusqu’à trois semaines, c’est pourquoi on ne s’y engageait pas à la légère. Robert FOSSIER en atteste pour la période médiévale en écrivant que :

« Le moment des vendanges est une grande étape dans la vie des campagnes, et dans tout l’Occident, puisque la vigne est partout. »1

Plus que tout les vendanges sont synonymes de la fin d’une année de dur travail de la vigne, et marquent le passage vers l’étape suivante: entamer le processus de vinification. Les vendanges sont accompagnées d’une fête avec les employés, les vendangeurs et la famille du récoltant. Elles sont donc avant tout l’occasion d’une forte convivialité : chants, danses, et cortèges s’effectuent dans une pure tradition dionysiaque, que l’Église ne veut ou ne peut empêcher. Le clergé y trouve d’ailleurs son compte : les curés profitent de ces rites et fêtes agraires pour y prélever la dîme.

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1FOSSIER, Le travail au Moyen-Age, Hachette littérature, Paris, 2000 ; page 194.