Dès le XIe siècle les moines deviennent les principaux producteurs de vins puisqu’ils possèdent une main d’œuvre non négligeable ainsi que des pressoirs, des celliers, des caves et également des techniques de rendement. Il faut d’ailleurs garder à l’esprit que à l’époque c’est la quantité qui prime et non pas la qualité. Ce rapide enrichissement va donc créer des contestations, marquant le début de l’aventure cistercienne, ordre monastique, dont les principes de vie sont liés à l’austérité et dont l’ambition viticole (domaine dans lequel ils deviennent très compétents) est de donner un vin de meilleure qualité. C’est donc cet ordre monastique implanté dans le gaillacois qui va nous intéresser dans la manière dont est organisée l’abbaye par rapport à la viticulture et son commerce.
Il faut noter, dans un premier temps que la qualité terre de la rive droite du Tarn ainsi que son exposition permettent une culture de la vigne tout à fait optimale, ainsi, dès l’apparition des premières abbayes dans le gaillacois le savoir et les techniques des moines leur ont permis une culture dans les meilleures conditions. Dans le détail, l’organisation de chaque abbaye lui est propre, toutefois on retrouve les mêmes traits de fonctionnement d’une abbaye à l’autre, premièrement ce sont les frères convers ( ou frères lais ) qui sont chargés des travaux manuels, des champs et donc aussi de la vigne. Ces travaux manuels représentent 4 à 6 heures de travail chaque jour. Les moines mettent aussi en place des baux sous la forme de contrats de complant, ce qui leur permet d’avoir une main d’oeuvre supplémentaire, un exemple dans le gaillacois est l’abbaye de Candeil fondée en 1150.
L’abbaye possède aussi un cellérier chargé de la gestion du cellier où sont donc conservées les denrées comme la bière et le vin. Le cellier est l’élément essentiel de la conservation du vin, il pouvait éventuellement faire partie d’un ensemble fortifié du monastère et creusé dans la roche ou en partie (voire dans sa totalité) enterré, ce procédé permettait de conserver la fraîcheur, d’éviter les vols et les murs épais protégeaient du gel. À noter que l’économie de l’abbaye était avant tout un économie de consommation, ce sont les besoins qui déterminent la production en premier lieu destinée à répondre aux besoins alimentaires puis dans un second temps l’excédant destiné à la vente.
Les terres nourricières se trouvent souvent éloignées de l’abbaye elles sont donc placées sous la tutelle d’un moine délégué appelé decanus, dont le tiers de sa production lui sert à gérer son centre, tandis que le reste part pour l’Abbaye. Le decanus doit toutefois respecter les consignes de production énoncées par l’Abbaye. Cependant les Cisterciens cultivaient eux-même leurs terres contrairement aux Clunisiens dont l’agriculture devient en grande partie externe. Il se trouve que les Cisterciens qui prônaient une vie austère vont connaître un rapide et fort enrichissement puisqu’ils vont vendre leurs surplus agricoles et surtout vinicoles ( ce qui n’était pas interdit par la règle de St Benoît ) mais qui vient quand même contredire leur idéologie initiale.
Cellier de l’abbaye Cistercienne de Noirlac près de Bourges semblable à ceux présents dans le Tarn.
On constatera donc que les abbayes possèdent des structures et une organisation permettant une culture du vin de qualité puisqu’en plus de leurs savoirs techniques les moines avaient l’avantage d’un sol très fertile et propice à ce type de culture. De plus la présence de celliers leur permettait de conserver leurs denrées durant de longues périodes si ces dernières n’avaient pu être vendues, c’est donc par les polycultures monastiques mais surtout par la production de vin que les abbayes du gaillacois connaissent un essor considérable qui constitue bel et bien un facteur important du développement de l’économie locale.
Pour approfondir sur la dynamique viticoles des abbayes.