Dans les années 1840, le chimiste Justus Von Liebig met au point une théorie selon laquelle les plantes ont besoin des sels minéraux contenus dans le sol pour se développer. Il affirme que la déminéralisation du sol suite aux nombreuses cultures est à la source de leur stérilisation, et que l’engrais provenant de matières végétales ou animales en décomposition restitue au sol ses minéraux, dont la chaux, le calcium, le soufre, le potasse, le magnésium et le fer. Il développe donc des phosphates chimiques afin de pallier à l’épuisement des sols. Il est le pionnier de la chimie minérale adaptée à l’agronomie.
L’utilisation des pesticides découle de l’évolution de cette chimie minérale. Ainsi, au XIXème siècle, on utilise principalement la bouillie bordelaise afin de lutter contre les champignons et, moins efficacement, contre le phylloxéra. Dans les années 1940, on voit apparaître les premiers produits phytosanitaires. Ils seront très vite utilisés en masse contre le moustique responsable du paludisme. La Seconde Guerre mondiale a généré de nombreuses recherches, notamment sur les gaz de combat dont l’usage a été détourné pour l’agriculture. L’usage des pesticides a, d’une manière générale, doublé tous les dix ans entre 1945 et 1985.
Le climat des années 1970 a favorisé l’utilisation massive des produits phytosanitaires tandis que les années 1980 voient arriver une multitude de nouveaux produits, tous plus performants les uns que les autres contre les maladies, les champignons et les insectes. La viticulture représente à elle seule 20% de l’utilisation des pesticides.
On peut constater l’évolution fulgurante de la consommation mondiale des pesticides dans l’agriculture sur 35 ans. En effet, entre 1950 et 1985 l’usage de pesticides est multiplié par près de 7, même chose pour les engrais dont l’usage est multiplié par près de 10.
Le mouvement qui touche le vin est similaire même si nous ne disposons que de très peu de chiffres concernant la vigne. A cette époque, la question de la dangerosité des pesticides ne se pose pas encore. Il faut imaginer l’euphorie générale provoquée par l’augmentation des rendements. Les pesticides sont en effet vus comme une solution « miracle » palliant les principaux aléas de la vigne, le climat et les parasites.
Une étude de 2005 consacrée aux conséquences des pesticides sur l’environnement a mis en évidence que ces derniers ont permis de préserver 50% de la surface de la forêt actuelle. En effet, depuis les années 1960, la productivité a été multipliée par 3 sur les parcelles traitées, ce qui aurait limité le mouvement de déforestation. D’autre part, de nombreuses maladies ont été éradiquées, ou fortement limitées. Enfin, on peut dire que le développement des pesticides répond clairement à un des enjeux de la mondialisation et du changement des pratiques de consommation. Il faut en effet produire rapidement et à moindre coût.